Interview de Urs Burger – Directeur Emil Frey aux Vernets
Le Monde Economique Selon un récent sondage, 1 Suisse sur 3 envisage l’hybride comme une possibilité pour l’achat de son prochain véhicule. Mais dans le même temps, on observe une réelle méconnaissance de cette technologie. Comment expliquez-vous cela ?
Urs Burger : En effet, on entend beaucoup parler de l’hybride ces dernières années. Mais réellement, seules 2 marques ont des véhicules totalement hybride dans leur programme et essaient de faire connaitre cette technologie au public. La plupart des constructeurs ont plutôt travaillé sur l’amélioration de leurs moteurs essence et diesel, pour diminuer leur consommation et émissions de CO2. L’hybride est devenu un phénomène de mode, renforcé par le scandale des moteurs diesels, mais il est vrai que les campagnes d’information sont encore minces et qu’il subsiste encore beaucoup d’idées reçues difficiles à contrer.
Le Monde Economique On a souvent l’impression que les constructeurs et les vendeurs de voitures ont tôt fait de présenter comme « hybride » la moindre auto capable de récupérer une part de l’énergie cinétique gaspillée au freinage. Ne sommes-nous pas souvent abusés par le qualificatif d’hybride ?
Urs Burger : Un véhicule qui peut récupérer l’énergie cinétique n’est pas forcément un véhicule hybride. Mais l’on peut distinguer plusieurs catégories dans le terme « hybride ».
Le premier est le « Mild Hybrid » qui utilise l’énergie électrique uniquement en supplément du moteur traditionnel, comme un complément ou un booster.
Ensuite vient le « Full Hybrid », développé par Toyota depuis plus de 20 ans, avec 1 moteur thermique et une batterie électrique, qui travaillent en synergie ou de manière indépendante suivant les circonstances de la conduite. La batterie est rechargée de manière autonome, grâce à l’énergie produite par le véhicule.
Enfin le « Plug-In Hybrid », qui reprend le fonctionnement du « Full Hybrid », mais qui offre, en plus, la possibilité de charger le véhicule sur secteur, afin d’augmenter la capacité à rouler uniquement sur la batterie électrique.
Le Monde Economique Comparé à un modèle normal, une version hybride présente un coût plus élevé pour une prestation similaire et l’économie à l’usage n’est pas forcement significative. Acheter une voiture thermoélectrique ne s’apparente-t-il pas finalement à un acte militant ?
Urs Burger : Il est vrai que les versions hybrides sont souvent plus chères que leurs homologues à moteur thermique et que comparé à ces derniers, il n’y a pas de réelle économie de consommation.
Le grand avantage se situe dans les valeurs d’émissions de CO2 qui sont significativement plus basses. On peut effectivement parler d’une manière de se positionner par rapport à l’environnement dans son acte d’achat.
Le Monde Economique Dans un climat de défiance envers le diesel, plusieurs constructeurs tels que Lexus ont fait le pari sur des motorisations hybrides. Cela donne-t-il une indication claire de l’orientation de la future stratégie des constructeurs pour l’automobile de demain ?
Urs Burger : Lexus a abandonné la motorisation diesel depuis 3 ans déjà. Toyota a également décidé d’arrêter la production de ce type de moteurs. De plus en plus de constructeurs se concentrent désormais sur les technologies alternatives que sont l’hybride, l’électrique, etc.
Toute la polémique autour du diesel a accéléré ces démarches, particulièrement sur le marché européen.
Le Monde Economique L’Europe imposera en 2020 que la moyenne des voitures neuves vendues par les constructeurs émette au maximum 95 g de CO2 par km. Est-ce que ce sera suffisant pour booster les ventes de voitures vertes en Suisse ? Si non, comment inciter davantage les consommateurs ?
Urs Burger : Non, il s’agit d’une moyenne à atteindre et certains constructeurs y parviendront avec de petits moteurs thermiques. Pour vraiment inciter les consommateurs à se tourner vers les technologies alternatives, seul l’aspect financier, par les impôts, peut avoir un réel impact. On peut le constater dans des pays comme la Norvège ou les Pays-Bas,
Le Monde Economique La Toyota Prius est-elle toujours la reine du marché des hybrides?
Urs Burger : On peut qualifier la Toyota Prius de reine des hybrides au niveau technique, car c’est le modèle le plus moderne et le plus avancé technologiquement. Par contre, au niveau du volume de ventes, elle est devancée par les modèles plus populaires que sont les Auris et Yaris.