Monde Economique : Aujourd’hui de plus en plus de salariés comme les seniors sont exclus du marché du travail. Pensez-vous que le portage salarial pourrait leur offrir une seconde chance ?
Khaled Yatouji : Non seulement c’est possible mais c’est aussi une chance pour les entreprises qui ont enfin accès à des profils expérimentés. Nous avons même en activité des personnes retraités qui possèdent un savoir-faire unique.
A un certain âge, il est beaucoup plus efficace et flexible de se faire porter plutôt que de se lancer en indépendant.
Les entreprises qui ne savent pas comment faire appel aux seniors dans un cadre légal trouve dans la solution du portage salarial la faisabilité de l’intervention permettant enfin de libérer ces énergies.
C’est non seulement une seconde chance pour les seniors, mais aussi des opportunités pour les cadres qui ont été licenciés par leur entreprise. Plutôt que de créer une structure (indépendant ou société) ou reprendre un emploi fixe, le portage salarial leur offre une 3ème voie. Cette solution « hybride » leur garantit une forte autonomie tout en bénéficiant des avantages du salarié, le tout sans les contraintes administratives. Au final le consultant est concentré sur son cœur de métier.
Le portage est une formidable opportunité de développer une activité en toute liberté.
Monde Economique: Depuis son lancement en Suisse le portage salarial a fait couler beaucoup d’encre. Que répondez-vous aux avocats qui soutiennent que cette nouvelle forme de relation contractuelle dans le monde du travail relève d’un véritable « no man’s land juridique » ?
Khaled Yatouji : Nous comprenons le besoin de vouloir légiférer les nouvelles évolutions et changements liés aux nouvelles formes du travail. C’est d’ailleurs le choix de notre voisin français qui a ajouté une ordonnance supplémentaire (n° 2015-380 du 2 avril 2015) créant ainsi un vrai statut très favorable au portage salarial.
Mais là où la France ajoute de la complexité au code du travail (qui au passage a triplé en 25 ans), la Suisse préfère jouer la carte du pragmatisme avec une législation allégée.
La réponse se trouve déjà dans l’arsenal juridique existant et le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) assimile le portage salarial à de la location de services (L.S.E).
Les entreprises de portage doivent donc obtenir une autorisation des autorités cantonales et du SECO pour effectuer leurs activités.
En tant qu’acteur du marché, nous voyons trop souvent des consultants intervenir en Suisse sans cadre légal. Aussi le portage salarial garantit pour les institutions une parfaite conformité sociale (règlement de l’AVS), fiscale et migratoire (permis de travail).
Monde Economique : A vous écouter le portage salarial est une activité très réglementée ici en Suisse, quelles sont les compétences nécessaires et suffisantes pour diriger une telle structure ?
Khaled Yatouji : Il y a des compétences indispensables mais il faut aller bien au-delà du minimum pour garantir une excellence de services.
Au-delà des compétences techniques (Fiscalité dans 26 cantons, droit du travail, système social, immigration, assurances, retraite, maladie, accidents etc…) il faut savoir personnaliser chaque cas pour créer une solution « sur mesure ».
Pour garantir une efficacité opérationnelle, il faut impérativement utiliser les technologies digitales pour accélérer et simplifier les processus.
Travailler avec une structure réactive est une garantie de résultat pour le consultant et le client. En effet c’est aussi la société de portage qui doit gérer efficacement la relation client (contrats, facturation, recouvrement).
Monde Economique : Par définition toute relation d’affaire peut être risquée, quelles sont les risques auxquelles s’exposent les salariés qui font appel à ce nouveau dispositif légal, et quelles sont les parades les mieux adaptés pour les couvrir?
Khaled Yatouji : Il y a deux risques, la fiabilité financière de la société de Portage (capacité et conformité) et celle du client final.
En cas de défaillance de la société de portage, une garantie financière (L.S.E) pourra couvrir les salaires des consultants mais arriver à ce stade il est souvent bien trop tard.
Aussi il est indispensable de s’assurer en amont de la santé financière et de la solidité de la structure.
Quel est son statut (Sarl, SA, autre…), son historique, son équipe et la taille de la structure, l’état de sa trésorerie pour assurer les salaires ? Demandez des attestations (non poursuites, conformité AVS, fiscale et assurances)
Bien trop souvent les sociétés de portage sont en fait 2 voire 3 personnes encore au stade « artisanale ». Leur taille ne leur permet pas de suivre les dossiers avec la rigueur nécessaire.
Pour éviter les risques, mieux vaut s’adresser à une structure solide, établie en Suisse avec des outils modernes. Ainsi vous pourrez vous « laissez porter » en toute sérénité.
Monde Economique : Certains salariés portés reprochent aux entreprises de portage salarial, le fait qu’elles ne mettent pas en vitrine leur portefeuille de talents. Peut-on imaginer, le jour où il en sera autrement, que ces dernières deviendront de véritables places de marchés sécurisés ?
Khaled Yatouji : Aujourd’hui une vraie société de portage salarial reste neutre et ne fait pas de recrutement tout comme une société de recrutement ne fait pas ou très mal du Portage salarial.
Dans la chaine de valeur, le consultant a déjà trouvé sa mission et nous sommes situés en « post process » pour finaliser la solution administrative.
Le consultant porté recherche avant tout une solution optimale et conforme, c’est la base du succès du Portage.
Nous nous adressons par nature à tous les corps de métiers et la diversité rend impossible les connexions entre experts et clients.
Par contre rien n’empêche de le faire de façon informelle et le bouche à oreille fonctionne très bien, mais l’institutionnaliser est un tout autre métier qui requiert d’autres compétences.
Néanmoins il est clair que c’est une piste d’évolution potentielle, nous connaissons les clients et les consultants, reste à créer le lien entre les deux.
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