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Des PMI manufacturiers en forte hausse et nettement supérieurs aux attentes, attestent d’une activité industrielle en grande forme… Une enquête ZEW qui suit la même dynamique, et démontre une confiance accrue des investisseurs allemands portée par l’euphorie de début d’année sur les marchés… Des résultats d’entreprises qui battent largement les anticipations, avec des taux parmi les plus élevés ces dernières années… Des images de restaurants ouverts en Italie ou Espagne qui annoncent le retour à une vie normale… Sous de nombreux angles, la situation en zone euro semble s’améliorer. Ce momentum favorable pourrait même, à court terme, offrir un potentiel de surperformance à des actions européennes en légère sous-performance depuis le début de l’année.
A plus long terme, en revanche, les perspectives sont moins réjouissantes. En mettant en œuvre des mesures de restrictions nettement plus drastiques et étirées dans le temps que sur d’autres continents, les dirigeants européens ont lourdement impacté l’économie du Vieux Continent. En parallèle, la réponse budgétaire, certes rapide, n’en est pas moins insuffisante au regard de la concurrence mondiale. Alors qu’un troisième plan de relance devrait être entériné sous peu côté américain, l’hypothèse d’un second plan pour l’Union européenne relève du fantasme. Ainsi, le stimulus fiscal aux Etats-Unis représentera-t-il plus de 10% du PIB anticipé pour 2021, contre seulement 6% en zone euro(1). Les conséquences sont loin d’être neutres.
Entre la période pré-crise et aujourd’hui, l’écart de croissance attendue entre la zone euro et les autres grandes zones économiques s’est en effet accru. Il y a un an, l’écart de croissance sur 3 ans (2020 à 2022) était de 2% entre la zone euro et les Etats-Unis, et de 14,6% entre la zone euro et la Chine. Ces écarts sont aujourd’hui respectivement de 3,3% et 16,4%. Fin 2022, le PIB américain pourrait être en hausse de près de 4% par rapport à son niveau de fin 2019(2). En zone euro, il le dépassera à peine. On retrouve la même dichotomie en considérant les attentes de résultats d’entreprises. Sur un horizon de 12 mois, les bénéfices des entreprises américaines devraient retrouver leur niveau d’avant crise. En zone euro, ils pourraient être encore en retrait de près de -20%.
Prise dans sa globalité, la zone euro peut donc sembler guère attrayante pour un investisseur, en relatif aux Etats-Unis ou à l’Asie émergente. Elle dispose néanmoins de certains atouts. La zone euro possède notamment un très riche vivier d’entreprises exposées à la consommation asiatique. Les récents résultats de l’Italien Moncler illustrent parfaitement la pertinence d’investir sur ces entreprises. Le groupe de luxe, qui réalise 49% de ses ventes en Asie-Pacifique, a en effet publié des chiffres très nettement supérieurs aux attentes du marché, avec notamment un résultat annuel supérieur de 20% aux anticipations. Et les ventes en Asie ne sont pas pour rien dans ces résultats. Elles ont augmenté, au quatrième trimestre, de 26% et même de 60% en Chine ! De quoi compenser largement le recul de -13% des ventes en Europe. Même son de cloche du côté d’Hermès, avec des ventes en recul de -9,8% en Europe, mais qui s’envolent de 47,4% en Asie (hors Japon).
Indubitablement, la faiblesse de la réponse budgétaire européenne fait peser un risque de sous-performance structurelle des actifs européens à long terme. Il n’en demeure pas moins que de nombreuses entreprises européennes, notamment grâce à leur ouverture internationale, peuvent faire fi de ces perspectives moroses. Et c’est sans doute sur celles-ci qu’il faudra investir pour les années à venir.
(1) Sources : Financial Times & Unicredit
(2) Données basées sur le consensus Bloomberg
Rédaction achevée le 19.02.2021
Auteurs : Olivier de Berranger, CIO et Enguerrand Artaz, Fund manager, LFDE
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