Photo de gauche à drotie Andreas Bezner et Konstantin Heiermann © Stableton & Norman K
Par Sabah Kaddouri
Beaucoup d’entrepreneurs y aspirent, mais seuls quelques élus feront partie des happy few. Lever des fonds ne s’improvise pas, dès lors comment optimiser ses chances ? Le Monde Economique a interrogé deux acteurs (Stableton & Norman K) au coeur de l’écosystème.
Pour qui veut courtiser les investisseurs doit au préalable élaborer un véritable plan d’attaque, mais surtout être prêt à anticiper et répondre à toutes les questions. Justifier son augmentation de capital, démontrer l’adéquation produit / service avec un besoin réel du marché, offrir des perspectives tangibles en termes de développement et de croissance, inspirer la confiance et la maîtrise : lors de son grand oral, rien ne doit être laisser au hasard. Concrètement, il y a trois questions à se poser éclaire Olivier Liot, co-fondateur de Norman K, une structure de gestion de fortune internationale comptant nombre d’entrepreneurs suisses et étrangers dans sa clientèle. « En premier lieu, quel est le budget nécessaire pour le développement de sa société ? Quid de la valorisation de son entreprise ? Quel est le pourcentage de dilution envisagé ? Ces trois facteurs et leurs calculs sont tous liés. Tout aussi important, le sujet de la gouvernance qui permettra de déterminer le rôle souhaité par les nouveaux actionnaires : passifs (sleeping partners) ou actifs (siège au conseil d’administration, partenariat actif, etc.», détaille le Wealth Manager.
Poncif ou pas, il faut garder en tête cette boussole : le monde des affaires n’apprécie guère l’incertitude. Dès lors, il faut jouer la carte de l’autorité sans toutefois tomber dans l’excès de confiance, ni dans la surenchère. « Il n’y a rien de tel que de montrer aux bailleurs de fonds que votre idée a vraiment de la force sur le marché. Chez Stableton, nous avons su générer des profits bien avant notre premier tour de table. Uniquement sur l’année écoulée, notre plateforme d’investissement alternatif a quasiment quadruplé son activité, cette trajectoire atteste de notre faculté à relever les défis que nous nous sommes fixés dans notre secteur. », expose Andreas Bezner co-fondateur de la FinTech au côté de Konstantin Heiermann. Le Zurichois et son acolyte se sont donnés pour mission de démocratiser les investissements sur les marchés privés. Lorsque les deux hommes ont commencé en 2018 à examiner plus en profondeur la question d’accessibilité capitalistique, ils n’en ont « pas cru [leurs] yeux », témoignent-ils. « Aussi facile qu’il soit pour chacun d’entre nous aujourd’hui d’utiliser Netflix, Spotify ou Airbnb dans notre vie quotidienne, investir dans de telles startups s’est avéré être tout le contraire ! ».
Poncif ou pas, il faut garder en tête cette boussole : le monde des affaires n’apprécie guère l’incertitude
Changer la donne. Les Suisses ont rapidement su murmurer à l’oreille des financiers qu’ils soient institutionnels, issus de family offices, de friends & family ou de venture capital, tous ont compris la plus-value d’un tel objectif. Le timing s’est aussi avéré clef dans leur entreprise en raison notamment de la récente réévaluation des risques, les investisseurs précoces et les anciens employés des start-ups ont cherché à vendre leurs participations, parfois à un prix très bas. Une tendance d’ailleurs toujours aussi vraie en 2022. « Ce contexte s’accompagne d’opportunités pour nos clients, car ils peuvent accéder à des opérations présentant un risque nettement inférieur et des horizons temporels plus courts. Nos investisseurs nous voient réaliser avec nos clients des transactions passionnantes qui n’étaient auparavant accessibles qu’aux plus grands fonds institutionnels. », se réjouit Andreas Bezner.
Le Suisse allemand peut effectivement avoir le sourire, sa société gère aujourd’hui un portefeuille de plus de 250 millions de dollars et vient de remporter le Swiss FinTech Award au début de l’été. Stableton a par ailleurs conclu un nouveau tour de table en juillet d’un montant de 15 millions CHF pour accompagner sa croissance fulgurante.
FinTech, MedTech, GreenTech…dans cette course aux levées de fonds qui ne semble pas connaître d’essoufflement, il y a comme une perception FOMO (Fear Of Missing Out) qui se caractérise par « la crainte de manquer un investissement dans la dernière pépite / future licorne. De plus, pour être adoubé par certaines sociétés en tant que nouvel investisseur, il faut souvent se lever tôt et prendre le risque de rentrer dans les premiers tours (Early Stage) afin de pouvoir continuer à investir dans les levées suivantes. », analyse Olivier Liot.
La moisson 2022 des collectes de fonds sera encore très intéressante à scruter.
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