C’est la crise ! Internet, la radio, la télé, les journaux nous rabâchent toute la journée catastrophes économiques, monétaires, écologiques, financières, etc. A croire qu’ils ont pour mission d’instaurer la terreur et la déprime dans toutes les populations, de créer un hyperstress, des malades d’angoisse recroquevillés dans leur coquille, manipulables à souhait…. En ces périodes de morosité ambiante, aussi superflu un travail sur son image puisse-t-il a priori paraître, voici quelques exemples récents de mission en entreprises révoquant cette idée.
Une très grande banque privée de la place genevoise à accordé une série complète de séminaires sur l’image (tenue vestimentaire, maquillage, coiffure, maintien, savoir-vivre contemporain, business étiquette) à son équipe de réceptionnistes en guise de remerciement et de reconnaissance – manifester à ces femmes que leur fonction était capitale – en marge des raisons de perfectionnement.
Les collaboratrices du département RH et accueil d’une grande entreprise suisse de commerce de détail ont désiré et fait la demande d’un séminaire sur l’image. Bien que le contenu de la formation proposée et le budget aient dans le principe été approuvés par le « chef », ce dernier a initialement rejeté la mission de formation, arguant le « manque de sérieux » du sujet, apparemment en décalage avec la morosité ambiante. Les collaboratrices se sont alors battues pour obtenir cette formation, sous prétexte de justement… combattre le marasme économique – comme pour nous dire « nous le valons bien… »… et… ont gagné ! Pourquoi ? Parce que prendre soin de soi à travers son image répond en réalité à trois besoins aussi utiles et profonds les uns que les autres – que certains secteurs économiques reconnaissent, revendiquent et admettent :
Tout d’abord, devant le nivellement global de la performance et de la qualité des services ou des produits, qu’est-ce qui différencie réellement aujourd’hui les entreprises entre elles ? Le facteur humain et les « soft skills » – « pour que chacun soit une présence, pas un fardeau ». Que l’on s’en réjouisse ou qu’on le déplore, notre présentation, notre attitude et notre savoir-vivre constituent une forme de discrimination silencieuse. Cet aspect de la communication occupant désormais une place plus importante, les entreprises ont adopté une politique de renforcement de leur identité en centrant leurs efforts sur leur actif le plus précieux, à savoir leur personnel, sa présentation et son comportement.
Ainsi, sur les marchés actuels où la concurrence économique fait rage, la médiocrité n’est plus guère satisfaisante. Résultat : votre présentation et votre comportement peuvent aussi bien favoriser qu’entraver votre parcours professionnel. A fortiori, dans une dynamique de recherche d’emploi, lorsqu’il s’agit de faire passer un message et de convaincre dans un laps de temps écourté : à compétences et à expérience égales, on préfèrera toujours le candidat le plus agréable en société et le mieux présenté. Ainsi, transposée dans le cadre de l’entreprise, l’image constitue un outil supplémentaire permettant de transformer un facteur humain en facteur de succès, pour le bénéfice de l’individu, de l’équipe et de l’entreprise, avec des résultats opérationnels.
Par ailleurs, la liberté individuelle et la société de l’information dans laquelle nous vivons nous font nous poser toujours plus de questions sur tout. Cela procure une fatigue mentale additionnelle qui nous pousse à nous réfugier dans le bien-être. La crise actuelle amplifie ce besoin de sécurité et de réconfort.
Pour précisément montrer à quel point toute démarche sur son image est tout sauf anodine – puisque directement liée à la confiance en soi et à l’identité, je pourrais citer quelques interventions dans des univers fragilisés. Formatrice auprès de l’Association Suisse de Sclérose en Plaques par exemple, il m’est ô combien agréable de me rendre compte qu’au fil du temps et des années d’expérience, le milieu médical ou hospitalier se rend compte des bienfaits exceptionnels de l’image de soi. Les professionnels prennent conscience de l’impact de l’image corporelle sur des personnes en état de souffrance et dont les conditions de vie aboutissent à une perte progressive d’identité.
Il est aussi vrai que la plupart des structures à partir desquels se sont forgées les valeurs, l’existence et la personnalité de nos ancêtres sont en train de s’effriter : abolition des institutions, amenuisement des modèles familiaux ou précarité économique font de nos sociétés des communautés sans repère, vécues comme un milieu au mieux stressant, au pire hostile. Et la mondialisation ultralibérale ne fait que nous enfoncer dans ce sentiment de n’être plus que des pions anonymes. Face à l’adversité de cette époque dénudée de repères, de plus en plus nombreux sont ceux qui se désinvestissent de la vie socioprofessionnelle et mondialiste pour se recentrer sur leur sphère intime et personnelle – la génération Y par exemple. C’est alors qu’ils se mettent à cultiver les petits bonheurs du “bien dans sa peau », seule chose encore directement maîtrisable. A défaut de contrôler son existence dans un monde de plus en plus insaisissable, à force de ne plus pouvoir compter sur rien, ni sur personne, l’être humain finit par se voir acculé à la gestion de son propre destin et donc de son propre corps. Manière symbolique de ne pas perdre sa place dans le tissu du monde et de se procurer du sens, de la valeur, des projets, etc. C’est dans cette évolution actuelle consumant tous les pays industriels que s’inscrit l’image, porte-drapeau de la frontière entre l’harmonie intérieure et extérieure. Le corps et l’image arrivent ainsi à devenir surface d’inscription en cas de mal-être et de refus plus aigus. Bien vivre signifierait-il alors trouver un équilibre entre le monde intérieur et le monde extérieur avec pour langage celui de l’image ? Ce qui passerait alors par le fait de se sentir bien dans sa peau, bien dans son corps, bien dans ses « fringues », vis-à-vis de soi-même comme vis-à-vis des autres.
Interviewée par un quotidien français, une palestinienne confiait qu’elle continuait à se teindre les cheveux – dans son pays ravagé par la guerre et la violence. Elle expliquait que si elle se sentait démunie et impuissante face aux évènements, au moins elle pouvait encore changer la couleur de ses cheveux. A défaut de changer le monde, elle avait un moyen d’action sur son apparence physique.
Tout cela permet d’expliquer pourquoi, en situation de crise, le secteur de la beauté est généralement l’un des derniers à être affecté.
Réagissez ! Plutôt que de vous laisser abattre par le discours anxiogène qui tourne en boucle depuis des mois, rassurez-vous en étant proactif et en anticipant. Saisissez cette opportunité pour améliorer ce « marketing de soi », offrez-vous la consultation ou les séminaires de votre choix et mettez le pied à l’étrier en vue de mieux gérer votre budget vestimentaire.
Myriam Hoffmann, Chroniqueuse du magazine Le Monde Economique – Consultante en image et Directrice du cabinet Première Impression