« Il n’y a pas de drame, pas de drame du tout !”

17 septembre 2024

« Il n’y a pas de drame, pas de drame du tout !”

Photo C. Vidal © REYL Intesa Sanpaolo

Par Colin Vidal, Head of Clients & Business Development, REYL Intesa Sanpaolo

Comme l’a dit Robert De Niro dans une publicité désormais célèbre sur la Suisse : « Il n’y a pas de drame, pas de drame du tout ! »  Bien qu’il s’agisse d’une exagération, la Suisse continue de se distinguer par sa stabilité politique et financière ainsi que ses infrastructures et réglementations favorables aux investisseurs. Tous ces éléments contribuent à faire du pays un leader bancaire mondial et une destination incontournable pour les gestionnaires d’actifs.

En 2024, le marché suisse des fonds continue de croître, les actifs sous gestion atteignant plus de 1,5 trillion de francs suisses, soit une augmentation de plus de 130 milliards de francs suisses depuis janvier. Les marchés des actions et monétaires ont connu un fort développement dans le même temps. Nous constatons une demande croissante de fonds de la part des acteurs locaux et un intérêt accru de la part des gestionnaires étrangers.

Ne pas se reposer sur ses lauriers

Plutôt que de réagir et de subir l’évolution du paysage réglementaire, la Suisse a cherché à le façonner afin de consolider sa position et d’accroître la confiance des investisseurs. C’est ainsi qu’est né un accord historique entre la Suisse et le Royaume-Uni, où se trouve la capitale financière de l’Europe : Londres. Cet accord est unique, car il met l’accent sur la reconnaissance mutuelle des réglementations financières plutôt que sur l’harmonisation préconisée par l’Union Européenne.

L’Accord de Berne sur les services financiers (Acte de Reconnaissance Mutuelle ou « ARM »), signé le 21 décembre 2023, vise à améliorer l’accès au marché transfrontalier de certains services financiers de grande clientèle entre le Royaume-Uni et la Suisse. Cet accord est important, puisqu’il reconnaît l’équivalence des cadres juridiques et de surveillance des deux pays notamment dans la banque, les services d’investissement, l’assurance, la gestion d’actifs et les infrastructures des marchés financiers. L’accord permettra aux entreprises britanniques et aux personnes fortunées – y compris la banque et la gestion d’actifs – d’opérer en Suisse tout en continuant à respecter les règles réglementaires du Royaume-Uni et vice versa.

Implications

Alors que le Royaume-Uni et la Suisse se positionnent comme des centres financiers clés en dehors de l’Union Européenne, la réaction de cette dernière a été discrète. Les indices actuels montrent que l’Europe a probablement fini par accepter les rôles uniques de Londres et de la Suisse dans le paysage financier mondial. Il est donc peu probable qu’elle réagisse de manière significative. Si le Brexit a conduit à quelques délocalisations initiales de professionnels de la finance de Londres vers des villes comme Francfort et Paris, beaucoup sont revenus depuis, réaffirmant l’attrait durable de la City.

Concernant l’accord lui-même, l’ARM renforce la clarté juridique pour les services d’investissement tels que la gestion de portefeuille et le conseil en investissement. Fait important, il permettra également aux entreprises de s’engager sereinement auprès de certains clients au-delà des frontières. Les procédures d’accès au marché, la classification des clients et les obligations d’information sont clairement définies dans l’ARM, tandis que les gestionnaires d’actifs bénéficient d’une plus grande certitude quant à la commercialisation des fonds et la délégation de la gestion de portefeuille.

Les entreprises suisses et britanniques seront bientôt en mesure d’accéder facilement à des clients haut de gamme dans chaque juridiction. Par exemple, les entreprises suisses de services d’investissement pourront offrir des services directement aux clients britanniques sans être enregistrées au Royaume-Uni.  Leurs homologues britanniques bénéficieront également d’un accès similaire en Suisse. En matière de gestion d’actifs, l’ARM garantit l’accès au marché pour les entreprises suisses qui recherchent des clients britanniques et inversément, en maintenant les canaux de gestion de portefeuille existants.  Cet aspect est particulièrement important en raison de l’importante clientèle transfrontalière existante.  

La reconnaissance mutuelle débouchera-t-elle sur des gains mutuels ?

L’accord doit encore être ratifié par les parlements des deux pays avant d’être mis en œuvre, mais l’optimisme est de mise. La réduction potentielle des formalités administratives et l’efficacité accrue des opérations transfrontalières figureront parmi les avantages les plus évidents, en particulier pour les gestionnaires de fonds cherchant à exploiter ces deux marchés. Les banques suisses devraient bénéficier d’avantages considérables, car elles peuvent désormais servir plus efficacement les clients britanniques sans avoir à établir une présence physique au Royaume-Uni.

La reconnaissance mutuelle prévue par l’accord devrait donc réduire considérablement les obstacles réglementaires pour les prestataires de services financiers suisses et britanniques. Elle renforcera sans aucun doute la compétitivité internationale et l’attrait des deux centres financiers.

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