Étude sur le café : Les Suisses préfèrent l’espresso au café crème et préparent leur café à la maison en raison de la hausse des prix
L’industrie du café et la culture du café connaissent une profonde mutation. Sur la base d’un sondage réalisé auprès de 7’000 consommateurs dans 13 pays, la première étude sur le café de l’entreprise d’audit et de conseil Deloitte Suisse passe au crible les principales tendances sur le marché du café en Suisse et à l’international : malgré l’existence d’un grand nombre de coffee shops « branchés », le café instantané reste le mode de préparation le plus apprécié à la maison ; les jeunes préfèrent mettre plus de lait dans leur café que les personnes plus âgées, et tous attachent plus d’importance au café issu d’une production durable. L’étude montre également pourquoi il n’y a pas de « barrière de rösti » en Suisse en matière de café, mais qu’il existe bel et bien, en revanche, une « barrière du café ».
Au cours des dernières décennies, la Suisse est devenue une plaque tournante internationale du café : l’écosystème suisse du café a connu une croissance fulgurante ces derniers temps. Il est aujourd’hui constitué de torréfacteurs de renom ainsi que de certains des plus gros négociants de café de la planète et de fabricants de machines leaders dans le monde. En valeur marchande, la Suisse, qui comptait ces dernières années parmi les cinq plus grands exportateurs de café, se situe actuellement en deuxième position derrière le Brésil, avec une valeur d’exportation de plus de 3,2 milliards de francs en 2023. Un résultat d’autant plus remarquable que la Suisse n’est pas un pays producteur de café et qu’elle ne dispose pas non plus d’un marché domestique du café de grande envergure. Aussi le café est-il le produit agricole le plus exporté de Suisse, avec une valeur d’exportation annuelle nettement plus élevée que pour les produits suisses traditionnels comme le chocolat et le fromage.
Karine Szegedi, responsable du secteur des biens de consommation chez Deloitte Suisse : « Pour le marché international du café, la Suisse est le pays idéal. Les négociants évoluent dans un écosystème constitué de banques, d’assurances, d’armateurs et de transporteurs qui soutiennent et facilitent leur activité. L’État offre en outre un environnement stable et une sécurité juridique pour faire des affaires en Suisse. L’interaction de ces facteurs de localisation a conduit dès le début des années 2000 à un essor véritablement remarquable de l’industrie suisse du café. »
En matière de consommation, la tendance à la commodité et au gain de temps trouve également son illustration dans l’industrie du café : de nombreux consommateurs boivent du café plusieurs fois par jour, ce qui explique le rôle important accordé à la préparation du café à la maison en termes de commodité (voir illustration 1). Au niveau mondial, le café instantané occupe incontestablement la première place du classement avec 39%, suivi du café filtre (28%) et du café en capsule (25%). La prédilection pour les produits prêts à consommer trouve également un écho dans la demande de café en canette et en bouteille. Cette variante de préparation du café jouit d’une grande popularité, principalement en Asie, en Amérique du Nord et en Grande-Bretagne. Là aussi, la différence entre les générations est éclairante : alors que les millennials aiment prendre leur dose de caféine sous forme de bouteille ou de canette, la préférence des générations plus âgées va plutôt vers la machine à café.
D’une manière générale, l’étude révèle des différences générationnelles importantes en matière de consommation de café. Ainsi, les jeunes générations ont tendance à boire moins de café que leurs aînés. La génération Z consomme en moyenne entre une et deux tasses par jour, tandis que la moyenne quotidienne chez les baby-boomers et les personnes plus âgées se situe entre deux et trois tasses par jour. Les jeunes générations ont tendance à boire plus souvent d’autres boissons à base de caféine – comme les boissons énergisantes, nettement plus populaires chez les jeunes buveurs de café que chez les générations précédentes (génération Z : 38%, baby-boomers et générations plus âgées : 11%). Les générations se distinguent également par le type de café qu’elles consomment régulièrement (voir illustration) : les jeunes consommateurs préfèrent les boissons au café qui contiennent plus de lait, tandis que les personnes plus âgées ont une prédilection pour le café noir.
Génération Z (1997-2012) | Millennials(1981-1996) | Génération X(1966-1980) | Baby-boomers(jusqu’en 1965) | |
Boisson au café la plus consommée | Café au lait | Cappuccino | Espresso | Espresso |
Deuxième boisson au café la plus consommée | Cappuccino | Café au lait | Café au lait | Café filtre |
Troisième boisson au café la plus consommée | Café instantané | Café instantané | Café instantané | Café instantané |
Illustration : boissons au café les plus consommées selon les générations.
En Suisse, l’espresso détrône le café crème
Traditionnellement, le café crème est considéré comme la boisson au café préférée des Suissesses et des Suisses. La présente enquête montre toutefois que l’espresso a détrôné le café crème en termes de popularité : dans notre pays, 46% des personnes interrogées préfèrent savourer le café sous cette forme. Suivent, à une certaine distance, le cappuccino (37%) et le café au lait (32%). Ces chiffres révèlent une forte « italianisation » de la culture suisse du café.
Parallèlement, l’enquête met en lumière des différences entre les différentes régions linguistiques. Par exemple, la Suisse alémanique est la région où l’on aime le plus ajouter un nuage de lait dans le café, tandis que le sucre est l’ajout préféré des Romands et des Tessinois. Alors que sur d’autres sujets, on constat souvent une « barrière de rösti » entre les différentes régions linguistiques, la présente enquête révèle l’existence d’une « barrière du café ».
Les consommateurs préparent de plus en plus leur café à la maison
Dans le monde entier, la consommation de café à la maison a gagné du terrain au cours de ces dernières années. Une première vague de préparation à la maison a été constatée pendant la pandémie de Covid-19, lorsque les consommateurs ont dû se contenter de préparer leur café à domicile. Une seconde vague est apparue entre 2021 et 2023, lorsque de nombreux pays ont été frappés de plein fouet par une inflation élevée et que les gens ont dû réduire leurs dépenses dans les domaines non essentiels, dont les sorties au restaurant et dans les cafés. Plus de la moitié des personnes interrogées (55%) dans le cadre de l’enquête ont déclaré que sous l’effet de la hausse des prix de ces dernières années, elles préparaient plus souvent qu’avant leur café à la maison, au détriment de la consommation à l’extérieur.
Karine Szegedi : « Pour l’industrie du café, la dynamique de l’inflation constitue certes un défi, mais aussi une opportunité de taille. Face à une disposition au renoncement accrue de la part des clients, l’attractivité du rapport qualité-prix est encore plus déterminante. Cela offre de nouvelles possibilités, par exemple dans le domaine de la vente directe pour la préparation du café à la maison. Les stratégies prometteuses sont les stratégies innovantes et rentables qui non seulement attirent de nouveaux clients sensibles aux prix, mais renforcent également la fidélisation de la clientèle régulière au travers de canaux numériques et de programmes de fidélité. »
La durabilité et les certificats gagnent en importance
La production de café est confrontée à de grands défis sur fond de changement climatique, de déforestation et d’extinction des espèces. Les consommateurs accordent de plus en plus d’importance au thème de la durabilité, tout comme aux certifications qui attestent le respect des normes sociales et écologiques dans la chaîne de production de valeur. C’est pourquoi un grand nombre d’entreprises de café ont lancé des initiatives pour proposer à leur clientèle un café issu d’une production plus durable. Près de la moitié des consommateurs interrogés dans le monde (46%) connaissent le café durable. Plus d’un quart d’entre eux (28%) affirment l’avoir goûté, et un bon sixième (17%) déclarent boire du café durable au moins une fois par semaine. Les personnes interrogées citent à cet égard plusieurs raisons. Pour elles, le plus important est de soutenir des salaires équitables et de bonnes conditions de travail dans la production de café (52%) et de contribuer à une économie du café durable (47%).
Roberto Micelli, responsable du développement durable et de Future of Food chez Deloitte Suisse : « La disposition à payer pour un café issu d’une production durable et certifiée illustre la sensibilisation croissante à la transparence et au commerce équitable. Dans les prochaines années, les producteurs ne devront pas miser uniquement sur la qualité, mais également sur une commercialisation stratégique pour rester compétitifs sur le long terme. Dans ce contexte, la durabilité n’est pas qu’une simple tendance, elle devient aussi la clé du succès commercial de l’industrie du café dans son ensemble. Notre étude montre qu’en Suisse, les consommateurs de café sont disposés à payer sensiblement plus cher pour un café durable. »
À propos de l’étude
L’étude Deloitte 2024 sur le café est le fruit d’un sondage en ligne réalisé en mars 2024 auprès de 7’000 consommateurs de café âgés de 16 ans et plus. Elle a mobilisé 1’000 participants en Suisse ainsi que 500 participants dans chacun des douze pays suivants : Brésil, Chine, France, Allemagne, Inde, Italie, Japon, Mexique, Corée du Sud, Espagne, Royaume-Uni et États-Unis. Les données de tous les pays ont été pondérées de manière égale aux fins de l’analyse. Les échantillons de pays sont représentatifs au niveau national en termes d’âge et de sexe – de même qu’en termes de revenus pour la Chine et l’Inde et de répartition linguistique pour la Suisse. Des entretiens personnels ont par ailleurs été menés avec des expertes et experts de l’industrie du café.
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