L’aménagement urbain est à l’aube d’une révolution dont les éco-quartiers constituent la genèse. A eux seuls, ils concentrent les défis économiques et environnementaux de demain, touchant autant à la question de l’habitat et de l’énergie, qu’à celle des transports, de la gestion des espaces verts jusqu’à celle des déchets.
Ce constat est motivé par le fait que plus d’un homme sur deux vit aujourd’hui en ville. L’effet d’agglutinement que l’on ressent parfois au sein des grandes agglomérations pointe le paradoxe de sociétés qui semblent fonctionner à deux vitesses.
Même si ce n’est pas le cas partout, les campagnes se désertifient, sont victimes d’exode, et les centres urbains devenus synonymes d’activité ne cessent de frôler l’asphyxie, semblent surchargés. Il n’est pas rare de faire face, dans la plupart des grandes villes européennes, à des phénomènes de pénuries du logement ou d’équipement public. Pour y remédier au plus vite, les politiques de la ville ont malheureusement fléchi devant l’urgence de construire, sans se concerter sur le bien-être des futurs habitants, ni même sur le respect de l’environnement.
L’urbanisation anarchique prend des risques à long terme parce qu’elle provoque un appauvrissement de l’écosystème (on parle de plus en plus d’un écosystème urbain) tout en participant à la paupérisation des habitants. Définir un idéal urbain semble donc important.
Un quartier durable c’est proposer à la fois un mode de gouvernance et une identité bien ancrée. C’est un ensemble urbain qui se veut pratiquement autonome, avec commerces, espaces de loisirs et lieux de rencontre, et dont les acteurs souhaitent redéfinir un vivre ensemble entre citadins.
Générant moins de coût sur le plan énergétique, l’éco-quartier met l’accent sur l’opportunité de vivre dans le respect de l’environnement, tout en garantissant une activité sociale et économique attractive. Les cantons romands, en accord avec la Confédération, semblent avoir pris connaissance de ces défis sans minorer leur difficulté, et sans sous-estimer les dépenses qu’elles occasionnent pour parvenir à la création de lieux de vie durables. A ceux qui prétendent que les quartiers durables n’existent que dans l’imagination de ceux qui les inventent, ces projets tenteront d’apporter une réponse :
Dans le canton de Vaud le projet Métamorphose qui doit servir de projet pilote, prévoit la prochaine destruction du stade de la Pontaise pour faire place à un ensemble de logements appliquant les principes de l’aménagement urbain durable, et à un complexe sportif.
La ville de Lausanne propose par ailleurs depuis le 1er janvier 2011 une énergie électrique d’origine 100% renouvelable, baptisée Nativa. Cette énergie est produite dans la région, et provient en premier du secteur hydraulique, en second des éoliennes, et enfin troisièmement de l’énergie solaire photovoltaïque. A Malley, cinq nouveaux quartiers réalisés selon les principes du développement durable verront le jour à l’horizon 2020…
A Genève, c’est un projet ambitieux qui voit le jour sur les bords du Rhône. L’ancienne usine à gaz de la Coulouvrenière subit actuellement une dépollution de son site. Celui-ci abritait des métaux lourds dangereux pour la santé.
Des logements durables et des espaces destinés à la culture devraient voir le jour dans ce quartier dont le désenclavement bénéficiera de la liaison de tramway reliant la gare Cornavin à Bernex dès décembre 2011. Cet ensemble, surnommé Artamis, fera certainement figure de modèle de quartier durable à Genève puisqu’il en constitue le premier chantier d’envergure.
Il existe un florilège de grandes mais aussi de plus petites initiatives, qui peuvent s’inscrire dans nos quartiers, même s’ils ne répondent pas à la réalité du durable : en 2009, le Département de l’environnement urbain de Genève avait par exemple conçu à destination des enfants un jeu informatique sur le tri des déchets, nommé Habilitri.
Plus largement, l’idéal d’un développement durable est partagé par de nombreuses entreprises suisses, et un grand nombre d’entre elles, grandes entreprises ou PME se sont déclarées prêtes à prendre en compte le critère de durabilité pour leurs prochains investissements immobiliers.
Quelles sont les raisons de cet engouement ?
D’abord participer au bien-être des collaborateurs tout en faisant un geste pour l’environnement et la société. Deuxièmement, transmettre une image positive tout en donnant l’exemple. Troisièmement, l’investissement peut se révéler rentable financièrement, notamment en terme d’économie d’énergie. Cette prise de conscience montre à quel point les quartiers durables ne sont plus les projets utopiques d’il y a vingt ans.
Faustin Rollinat/Rédacteur chez Le Monde Economique