"Coopérer pour innover", l’avis de Claudia Moerker, Directrice de l’association Swiss Export par Dr Peter Köppel

26 août 2012

"Coopérer pour innover", l’avis de Claudia Moerker, Directrice de l’association Swiss Export par Dr Peter Köppel

Presqu’un an après le blocage de l’euro à 1,20 franc, les groupes internationaux ont réduit leurs coûts en euros et s’en tirent assez bien, tandis que les petites entités restent en souffrance (voir Le Temps du 21 août, Temps fort, p. 3). L’on constate en effet, chez les petites entreprises, un certain attentisme, sinon une léthargie (NZZ du 12 août, p. 21: « Die Schweizer Wirtschaft im Sommerloch »). A la lecture de ces diagnostics, j’ai demandé à ma collègue au Comité du Forum PME/KMU, Claudia Moerker, directrice de l’association swiss export, quelle était sa vue de la situation actuelle des pme.

„Un sondage effectué dernièrement auprès de nos membres montre le même tableau triste“, me répondit-elle. „Outre le franc trop cher, ce sont les mauvaises perspectives de la conjoncture mondiale et la crise de l’euro qui préoccupent les patrons. En plus, l’industrie se voit confrontée de plus en plus, sur son marché domestique, à une concurrence forte du côté d’entreprises venant de l’Allemagne du Sud et produisant sous le régime d’un euro pour elles avantageusement faible.“

Comment les entreprises helvétiques ont-elles réagi? „Cela dépend de la branche: augmentation des heures de travail, recours au chômage partiel, achat de composants au lieu de les produire soi-même, réduction de la gamme des produits, délocalisations vers l’étranger et, dans les cas d’extrême urgence, recours à des licenciements.“ Selon Claudia Moerker, quelques entreprises ont réagi de manière offensive aussi, en cherchant et recrutant du personnel supplémentaire capable d’identifier et de réaliser un peu partout dans le monde de nouveaux débouchés via de nouveaux marchés et de nouveaux produits ou services. On s’attend en effet à une forte augmentation du dynamisme des marchés, ce qui comporte l’exigence de connaître à fond la culture de partenaires venant d’autres régions du monde.

„Quoi qu’il en soit, face aux perspectives actuelles sombres, les exportateurs helvétiques ont besoin de voir s’élargir leur marge de manoeuvre, massivement réduite par le cours trop haut du franc par rapport à l’euro“, souligne la directrice de l’association swiss export. En 2010, 62 pour cent des entreprises qui avaient répondu au sondage avaient désigné comme limite critique une fourchette entre 1.30 et 1.40 franc pour un euro. Lors du sondage actuel, la part de ces entreprises a augmenté à 87 pour cent. „Nos entreprises ont vu leurs bénéfices réduits de 33 pour cent en moyenne“, ajoute-t-elle, „à comparer aux 20 pour cent de réduction moyenne en 2010.“ 61 pour cent d’entre elles prévoient des délocalisations à l’étranger, dont 17 pour cent on déjà été réalisées, soit en achetant des composants dans la zone euro, soit en transférant une partie de la production ou la production entière à l’étranger, pour ne garder en Suisse que la distribution.

Quels allègements les patrons attendent-ils du côté des conditions-cadre? En premier lieu, un effort soutenu dans la dévaluation du franc trop fort par rapport à l’euro et plus de zèle dans la conclusion d’accords de libre-échange avec les marchés les plus importants. Une réduction sensible des droits de douane et de la charge administrative aideraient d’ailleurs à mieux gérer la situation. Finalement, des possibilités supplémentaires de s’assurer à bon marché contre le risque à l’exportation permettraient à bon nombre de petites et moyennes entités de se lancer dans des régions prometteuses, mais peu connues d’elles encore.

Cette discussion nous amène naturellement au Forum PME/KMU 2012, que nous réaliserons ensemble ce 8 novembre, au CSEM, à Neuchâtel, l’agence Koeppel + Partner, l’association swiss export et l’entreprise familienunternehmen CH. Il s’agit d’une initiative privée qui a pour but d’encourager les contacts entre entrepreneurs romands et alémaniques. Ce sera cette année la troisième édition – son thème: „coopérer pour innover“. „Cette devise dit exactement ce qu’il faut faire“, souligne Claudia Moerker. „Notez que tous nos membres interrogés nous disent sans exception qu’ils veulent de toute façon rester en Suisse, qu’ils veulent y maintenir et développer encore leur substance entrepreneuriale, que c’est là leur souci principal, même si, par ailleurs, ils doivent recourir à des délocalisations.

“ Je pense en effet comme Claudia Moerker que les coopérations sont de plus en plus nécessaires à l’innovation, et que nos entreprises doivent collaborer davantage si le know-how de l’innovation doit rester en Suisse. A l’époque des processus électroniquement et digitalement accélérés et de leur organisation en clusters de plus en plus complexes, on ne peut plus, en Suisse, s’en tenir dans l’enceinte de la région linguistique à chacun. Trop corsetées encore par la compartimentation du pays, les petites entités surtout sont appelées à élargir leur horizon mental et leur marge de manoeuvre en identifiant des opportunités de coopération – et de synergies – dans les autres régions culturelles du pays. Le programme du Forum PME/KMU 2012 sera publié sous peu sur le site www.forum-pme-kmu.ch.

Dr. Peter Köppel, Consultant pour le magazine Le Monde Economique et Président du conseil d’administration de Köppel+Partner

 

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