L’évolution de la politique genevoise, dans un parallèle saisissant avec la politique suisse, a marqué le triomphe du court terme, du chauvinisme et du populisme en temps d’élections comme l’a illustré le triomphe du MCG en 2009. Dans ce contexte de repli et de stagnation, il est difficile d’insuffler de véritables ambitions et visions d’avenir dans un projet politique.
C’est ce que j’aimerais cependant esquisser ici en rappelant une vieille motion datant de 2006 que j’avais déposée avec le groupe parlementaire PDC au Grand-Conseil genevois et qui portait sur la création d’une cité administrative regroupant tous les services de l’Etat.
La M1687 de 2006 invitait le Conseil d’Etat à demander un crédit d’étude portant sur l’aménagement d’une zone départementale regroupant tous les services administratifs de l’Etat en un seul et même endroit.
Un constat s’impose tout d’abord, celui effarant de l’immense éparpillement des activités d’un petit canton-ville dans 85 services répartis dans 32 bâtiments. Pour combler ses besoins énormes en place, l’Etat est obligé de louer 150 000 m2 de surface de bureaux à des tiers pour la somme de 40 millions de francs par année.
Des coûts supplémentaires de cette décentralisation s’ajoutent en matière d’énergie, de communication, de surveillance mais aussi de transports pour les fonctionnaires. Cette jungle administrative complique aussi sérieusement la vie des citoyens et des PME qui se voient contraints à des déplacements aux quatre coins du canton en plus des difficultés administratives inhérentes à cet éclatement. En créant un pôle géographique unique des services de l’Etat, on pourrait atteindre les buts suivants:
Premièrement, des entreprises genevoises se verraient gratifiées de juteux nouveaux marchés grâce à la construction des bâtiments de cette cité administrative. Il ne faut pas oublier que les métiers du bâtiment qui comprennent de nombreuses PME sont particulièrement fragiles en ces temps d’instabilité économique.
Un chantier tel que celui proposé rentrerait parfaitement dans un de ces fameux plans “d’investissement anticyclique ». De plus, il ne faut pas oublier que les projets actuels d’infrastructures comme le CEVA doivent souvent, pour des raisons techniques, être attribués en partie à des grands groupes étrangers. Un nouveau chantier permettrait donc de soutenir l’économie locale en particulier.
Deuxièmement, une cité administrative permettrait d’accélérer la fameuse réorganisation et rationalisation des tâches de l’Etat qui avance à petits pas actuellement. Les récents bons budgets dus en grande partie à une conjoncture favorable ne doivent pas contribuer à diminuer la discipline budgétaire. Or, le projet présenté ici permet d’économiser sur des charges inutiles sans procéder à de grandes réorganisations de personnel.
Après avoir financé la réalisation des bâtiments, les 40 millions dépensés en loyers chaque année pourraient être économisés et les anciens bâtiments pourraient être loués à des particuliers augmentant d’autant plus les recettes de l’Etat. Les coûts annexes de transport, de nettoyage, de correspondance entre les services, d’informatique etc. pourraient aussi se voir réduits par cette synergie. Enfin, un rassemblement des activités étatiques permettrait une meilleure vision et suppression des fameux doublons de l’Etat.
Troisièmement, un projet de cité administrative pourrait redensifier le tissu économique de la Ville de Genève qui menace toujours plus de se transformer en ville-dortoir. En effet, les locaux libérés par la réorganisation pourraient être loués à des entreprises privées désireuses de s’installer au centre-ville. Certains bâtiments pourraient même être transformés en logement, chose non négligeable dans la situation de pénurie actuelle et de manque de parcelles constructibles.
En somme, une cité administrative permettrait des économies sur le long terme et une clarification de la structure administrative par un regroupement géographique au bénéfice des citoyens, des fonctionnaires et des PME. Ce projet d’envergure permettrait de faire de Genève une vraie capitale régionale et de lui éviter le destin tragique d’une ville sclérosée, repliée sur elle-même dans sa peur de grandir et de l’étranger, situation qui aboutirait à un exode des entreprises du canton. Espérons que cette ambition parvienne rapidement à des résultats tangibles, cette motion étant en travaux avec une motion radicale similaire dans une commission parlementaire.
Luc Barthassat – Conseiller National