Le vieillissement de la population est devenu une priorité nationale pour la plupart des pays européens. Tout le monde sait que le nombre de seniors augmente, mais le véritable problème est le prix de leur prise en charge médicale qui lui explose: Avant on allait à l’hôpital pour ce faire « réparer », donc ça coûtait quelques jours, mais maintenant avec les maladies chroniques comme l’Alzheimer on entre en EMS et on y passe des années! Donc à terme, même si les personnes actives sont de très bonne volonté et acceptent qu’une partie de leur salaire soit destiné aux seniors, il n’y aura toujours pas assez d’argent, ni assez de personnel formé d’ailleurs, pour s’occuper de toutes ces personnes.
C’est pourquoi en plus des études sociales et politiques, les gouvernements attribuent des budgets de recherche pour trouver des solutions IT permettant aux seniors de vivre le plus longtemps possible de manière autonome, tout en veillant à leur sécurité, leur confort, leur liberté de déplacement et leur dignité. Un de ces projets est Virgilius (http://virgilius.eu), un guide spécifiquement adapté au seniors pour leurs déplacements.
La clé est le positionnement interne
Pour nous, un des points central de ces solutions est le positionnement et la localisation de personnes à l’intérieur des bâtiments. En effet, certains seniors hésitent à aller dans certains endroits, comme les grands centres commerciaux ou les hôpitaux, par peur de se perdre. Or ceci enchaîne un cercle vicieux: Plus la personne reste enfermée chez elle, plus elle perd de son autonomie, et moins d’autonomie lui donne de bonnes raisons de rester chez elle.
Un GPS d’intérieur
Contrairement au GPS qui fournit de manière universelle la position en extérieur, la solution idéale de positionnement interne pour un endroit donné dépend fortement du contexte. Un de nos axes de recherche consiste à réaliser un module appelé GPM, pour Global Positionning Module, qui intègre un certain nombre de techniques existantes, comme le positionnement par Wi-Fi ou Bluetooth par exemple, et qui est capable de sélectionner automatiquement le ou les systèmes qui fourniront la meilleure position et du coup le meilleur guidage pour l’utilisateur.
Le champ magnétique terrestre pour se repérer
Un autre axe de recherche sur lequel nous travaillons sont les solutions qui ne nécessitent pas de calibration. En effet, avec les solutions classiques comme le Wi-Fi ou le Bluetooth par exemple, il est nécessaire d’effectuer un grand nombre de mesures afin de connaître l’empreinte des signaux radio à différents endroits. C’est long, et en plus ces empreintes changent à chaque fois qu’un objet est déplacé dans la pièce. Par contre on observe que le champ magnétique terrestre est fortement perturbé à l’intérieur d’un bâtiment. Pour s’en convaincre, c’est très simple: il suffit de prendre une boussole et de marcher. On observe rapidement que même si on se déplace en ligne droite, le Nord lui ne se trouve pas toujours au Nord… En fait les lignes du champ magnétique sont perturbées par les structures métalliques, et donc l’intensité et la direction du champ est différente en tout point de l’espace. En observant la variation de ce champ à l’aide d’une boussole telle que celles qu’on trouve actuellement sur les smartphones, il est possible de déterminer dans quel point de cet espace nous sommes. Et on peut aller plus loin: avec plusieurs boussoles on peut même s’affranchir de toute calibration et tout paramétrage. Il suffit en effet d’en disposer une à chaque sommet d’un rectangle, par exemple aux quatre coins d’un smartphone. Du coup lorsque l’utilisateur se déplace, la modification du champ magnétique agit d’abord sur certaines boussoles, typiquement celles qui se trouvent devant par rapport au sens du déplacement, puis seulement après sur les autres. En mesurant le temps entre les variations observées par les boussoles, on peut calculer la direction et la vitesse de l’utilisateur, et donc en déduire sa position courante. Et si on prend 8 boussoles et qu’on les place sur les sommets d’un cube, alors on obtient même un positionnement en 3 dimensions.
Le smartphone comme dispositif médical
Ce que les seniors n’aiment pas c’est d’être stigmatisé. Pour eux porter un dispositif médical ou de sécurité, comme ces fameux bracelets GPS qui détectent les chutes, les mets mal à l’aise. Ils vont de loin préférer un téléphone mobile, comme les jeunes, qui finalement offre les mêmes fonctions et bien plus. On voit dans certains établissements, comme par exemple à la Maison de Retraite du Petit-Saconnex, que tout est fait sur le plan social pour offrir le plus d’indépendance que possible à leurs résidents. Et nous en tant que scientifique nous recherchons comment la technologie peut encore d’avantage offrir de la liberté et de la dignité à nos aînés.
Par Michel Deriaz, PhD – R&D Project Manager – Université de Genève –http://tam.unige.ch