Impôts, taxes et forfaits

28 novembre 2014

Impôts, taxes et forfaits

Il n’est pas un jour où l’on ne parle de paradis fiscaux et de fraude fiscale. Certains vont jusqu’à porter le débat sur le terrain de la moralité. Or il est consternant que l’ensemble des propos reporté par la quasi-totalité des médias repose sur un contre sens absolu. D’un point de vue purement moral, l’impôt, c’est du vol. Voler consiste à prendre à autrui ce qui lui appartient contre son gré, par la force ou par la ruse. Le faire à grande échelle, en invoquant « l’Etat », n’y change rien, et le reconnaître est déjà un premier pas notable.

Ensuite, tenter de justifier une expropriation sous la contrainte en invoquant la « nécessité » de le faire, ou les bonnes actions supposées que cette agression devrait permettre n’est pas valables non plus : si un bandit vous menace d’une arme pour vous prendre votre portefeuille, le fait qu’il utilise ensuite une partie de son butin pour aider une cousine nécessiteuse ne justifie pas son action.

Contrairement à une certitude trop répandue, il n’est pas de fonction assumée par l’Etat qui ne pourrait être remplie mieux et à moindre coût par des institutions privées en concurrence. Mais ceci dépasse le cadre restreint de cet article. De toutes façons, en admettant même que le rôle de l’Etat soit indispensable (ce qui est bien moins évident qu’on ne l’affirme en général), cela ne signifie pas que toutes les fonctions – et donc les dépenses – assumées par l’Etat sont nécessairement, systématiquement justifiées.

Impôts, taxes et forfaitsOr, contrairement aux individus ordinaires, hommes politiques et fonctionnaires s’arrogent le « droit » de dépenser d’abord, les contribuables ayant le « devoir » de payer ensuite la facture. Il est vrai que le conditionnement idéologique permet l’assentiment des victimes et rend le racket plus aisé, d’où l’uniformité des commentaires des médias et politiciens.

Non, les hommes politiques et les fonctionnaires, qui s’abritent derrière le concept « d’Etat », n’ont pas le « droit » de taxer : ils en ont la possibilité grâce à l’usage de la force et de la contrainte, ce qui est moralement discutable.

Non, l’évasion ou l’optimisation fiscale ne sont pas scandaleuses : ce sont des mesures de légitime défense quand la pression fiscale est excessive, mesures d’ailleurs aussi bien pratiquées par les gens fortunés que par les plus modestes (l’artisan qui se fait régler sa prestation en liquide).

Non, il n’y a rien de mal à être un paradis fiscal : depuis quand le paradis est-il mauvais ? Un paradis fiscal est un pays libre où les autorités respectent le droit de propriété et donc laissent les individus conserver leurs biens sans en confisquer une grande partie ni leur demander de se justifier. Où donc est le scandale dans tout cela ? Au contraire, ce sont ceux qui confisquent la moitié ou les trois quarts de la richesse des autres qui devraient avoir honte, et devraient apporter la preuve de leur légitimité.

Non, l’évasion fiscale ne « coûte » rien à l’Etat : un manque à gagner n’est pas un coût ! La victime qui parvient à sauvegarder une partie de son bien « coûterait » donc quelque chose à son agresseur ? D’autant que ceux qui se lamentent de ce « coût » dépensent déjà des centaines, voire des milliers de milliards, qui sont toujours insuffisants – tout en étant outragés de la prétendue avidité des patrons du secteur privé…

Les Suisses sont actuellement polarisés autours de la question du forfait fiscal. Au delà, le problème fondamental est celui de l’attractivité du pays : les Suisses veulent ils attirer dans leur pays les richesses du monde entier ou bien les faire fuir ? La Suisse peut redevenir attrayante même sans forfaits, et ne plus être attrayante tout en les conservant. Il semble hélas que ce soit cette dernière option qui ait été suivie ces dernières années. De même, conserver une concurrence entre les cantons est un des seuls moyens de limiter la gloutonnerie de politiciens et fonctionnaires. Y renoncer progressivement serait fatal : centralisation et uniformisation (pardon, « harmonisation ») sont liberticides et appauvrissantes ! Voyez la France… Les Suisses auront bientôt l’occasion de manifester encore leur bon sens légendaire.

Alexis Palazzolo, Contributeur pour le magazine Le Monde Economique

 

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