DONALD TRUMP, LE MILLIARDAIRE MAL-AIME

1 août 2016

DONALD TRUMP, LE MILLIARDAIRE MAL-AIME

Par ce temps de l’année passée, même ses sympathisants croyaient à son éphémérité politique : il était considéré comme la sensation d’une saison, l’événement d’un été. On prédisait qu’entrant, dès l’automne 2015, dans sa partie essentielle, la campagne présidentielle allait le balayer comme une feuille morte.

Une année plus tard, Donald Trump reçoit l’investiture républicaine pour la Maison Blanche. Maintenant, que l’on le veuille ou non, le milliardaire vise frontalement le poste présidentiel.

Le personnage est, on ne le sait que trop bien, haut en couleur, extravagant et imprévisible. Et il n’a pas une qualification politique spéciale pour diriger la plus grande puissance du monde. Derrière ses promesses de redressement de la grandeur de l’Amérique, on entrevoit facilement l’ambition toute personnelle d’un septuagénaire à qui jusqu’alors tout avait réussi, de rester dans la course et de ne pas abdiquer face à la vieillesse. Mais toutes ces « tares » ne peuvent pas expliquer le grand acharnement médiatique dont fait l’objet le candidat républicain depuis des mois.

Pourquoi, en effet, cette détestation disproportionnée ? Les causes sont sans doute plurielles. Penchons-nous d’abord sur une possible explication qui essayerait de répondre plus spécifiquement à la question pourquoi les milliards de Trump posent tellement de problème à toute une partie de l’électorat américain mais aussi aux élites intellectuelles européennes, toujours promptes à intervenir dans le débat présidentiel d’Outre- Atlantique, et bien sûr auy yeux de cette agora populaire moderne que représentent désormais les réseaux sociaux.

Eh non, il paraît qu’il ne s’agisse pas de simple jalousie humaine ; l’explication n’est pas aussi facile et primaire. La haine des milliardaires est plutôt un phénomène relevant d’une psycho- sociologie nouvelle qui, tirant ses origines des Trente glorieuses pour s’affirmer pleinement aujourd’hui, dans l’ère de la mondialisation, exalte les classes moyennes et marginalise les « riches ». Cette dernière étiquette est collée non sans mépris aux seules grosses fortunes (aujourd’hui la tendance est de considérer comme « riches » seulement les plus riches) tandis que les classes moyennes, même dans leur couche supérieure caractérisée par un standard de vie déjà très élevé, sont vues comme des « gens normaux » et saluées comme la vraie force motrice de notre époque numérique et post- moderne. C’est cette mentalité « moyennisée » qui semble maintenant crier gare aux milliardaires qui osent aspirer à des postes présidentiels. Dans cette perspective encore, Trump – et les autres milliardaires en politique – sont forcément vus comme des personnages arrogants et brutaux, privés de subtilité diplomatique et n’obéissant qu’aux injonctions de leur énorme ego.

Les seuls magnats que l’on nous invite à admirer dans nos sociétés désormais « moyennisées » sont ceux du numérique. On les célèbre – non sans raison d’ailleurs – comme des génies visionnaires, des figures providentielles qui ont révolutionné notre monde et qui, s’ils ont accumulé une grosse fortune, ce n’est pas par un vulgaire amour pour l’argent mais comme le fruit bien mérité de recherches et de découvertes dont aujourd’hui bénéficie la planète entière. Oui, cela est bien vrai mais on peut se demander si c’est une raison suffisante pour discréditer et dénigrer les magnats de branches plus traditionnelles et de par leur nature même – moins innovantes ? Ne peut-on d’ailleurs soupçonner un conflit secret, exacerbé à la faveur de la vertigineuse ascension de Trump, qui opposerait les magnats du numérique à ceux des branches économiques plus traditionnelles dont l’immobilier, le domaine où excellait l’actuel élu républicain ?

Dans ce sens, le quasi- refus des grandes entreprises numériques de contribuer au financement de la campagne de Trump est assez révélatrice. Il est vraiment étonnant de voir que les géants technologiques qui avaient toujours partagé d’une manière équitable leur soutien financier entre Démocrates et Républicains, en cette campagne 2016, ont décidé de ne rien accorder à Trump et de freiner ainsi symboliquement son envolée vers la Maison Blanche.

La détestation du candidat républicain de 2016 est sans précédent dans l’histoire plus récente des campagnes présidentielles américaines. Entre nouvelles élites numériques aspirant à la suprématie économique, classes moyennes conquérantes hostiles aux « riches », et intellectuels s’obstinant à entretenir l’image, planétairement reprise par les réseaux sociaux, d’un Trump stupide et inculte, le milliardaire n’a vraiment pas le beau rôle. Et ce n’est pas sa proverbiale impulsivité qui l’aiderait à s’en départir – une impulsivité et une imprévisibilité telles qu’elles autoriseraient, dans le pire des cas, un parallèle entre Trump et Truman pas trop flatteur pour le prétendant actuel à la Maison Blanche, étant donné que Harry Truman, fut le président américain directement responsable du bombardement atomique d’Hiroshima en 1945…

Mais pourquoi aller si loin dans les suppositions ? Donald est peut-être plus proche de Ronald, de ce Reagan qui, lui aussi mal-aimé pendant son parcours présidentiel et constamment décrié par une certaine élite, a néanmoins fait de bien bonnes choses. Juste pour le rappel – en 1989, cet ancien comédien a, ensemble avec le Russe Gorbatchov, réussi à faire chuter le Mur de Berlin.

 

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