Gestion de Patrimoine : Sept Questions Essentielles à Poser à un Conseiller

21 novembre 2024

Gestion de Patrimoine : Sept Questions Essentielles à Poser à un Conseiller

Photo © Indigita

Les banques privées et les sociétés de gestion de patrimoine présentent souvent leurs services sous des termes variés comme « Banque Privée », « Planification Patrimoniale » ou encore « Solutions d’Investissement ». Bien que ces appellations soient séduisantes, elles peuvent semer la confusion quant à la portée réelle des services proposés et aux frais associés. Ce manque de clarté souligne l’importance de bien saisir les enjeux de la gestion de patrimoine et de s’assurer qu’elle soit en adéquation avec les objectifs financiers du client. Poser les bonnes questions constitue la première étape pour prendre des décisions éclairées.

La sécurité des actifs

La sécurité des actifs est un pilier fondamental de la gestion de patrimoine. Lorsqu’un client confie son patrimoine à une institution, il est essentiel de comprendre comment les différents types d’actifs qu’il est amené à détenir ou à investir seront protégés. Par exemple, pour des actifs tangibles tels que les métaux précieux, il convient de demander s’ils sont conservés hors bilan par la banque. Une détention sur bilan les rendrait vulnérables en cas de difficultés financières ou d’insolvabilité de l’institution. De même, les actifs numériques, comme les jetons ou les cryptomonnaies, soulèvent des questions spécifiques : sont-ils sécurisés dans des structures indépendantes, ou sont-ils intégrés aux actifs de la banque ? La réponse à cette question est déterminante pour évaluer leur niveau de protection.

Les liquidités, bien qu’elles soient perçues comme des actifs simples et sûrs, méritent également une attention particulière. En cas de crise financière ou de faillite de la banque, ces fonds pourraient être affectés, sauf s’ils sont couverts par des mécanismes comme une garantie de dépôt ou placés dans des comptes hors bilan. Cette vigilance s’étend également aux actifs plus complexes, comme les fonds d’investissement ou les produits structurés, qui peuvent inclure des risques cachés liés à leur nature ou à leur mode de détention.

Ainsi, le client doit poser des questions précises sur le traitement des différents types d’actifs au sein de la banque et sur les mesures mises en place pour les protéger. Cela permet de s’assurer que les investissements proposés sont en adéquation avec ses besoins de sécurité patrimoniale.

Le cadre réglementaire

Il est tout aussi essentiel de comprendre le cadre réglementaire autour des activités de la banque, car il détermine le niveau de protection offert aux investisseurs. Par exemple, les clients européens peuvent privilégier des banques suisses qui se conforment aux normes MiFID II. Ce cadre réglementaire, adopté par l’Union européenne, impose des exigences strictes en matière de transparence, de gestion des conflits d’intérêts et de protection des investisseurs. Il donne également au client une voie de recours plus facile devant un tribunal européen. En revanche, certaines banques en Suisse choisissent d’appliquer uniquement la Loi suisse sur les services financiers (LSFin), qui bien qu’importante, offre un niveau de protection différent et parfois moins complet ou facile à contester, selon la situation du client.

Les banques qui appartiennent à des groupes internationaux peuvent bénéficier d’une double surveillance réglementaire : d’une part par les autorités suisses, et d’autre part par celles du pays d’origine du groupe. Cette supervision croisée renforce souvent la stabilité de l’institution et peut garantir des standards plus élevés en matière de gestion des risques et de transparence.

Un autre facteur à considérer est la cotation en bourse de la banque. Les banques cotées doivent se conformer à des obligations strictes de divulgation financière, ce qui garantit une transparence accrue sur leur santé financière, leurs ratios de solvabilité et leurs pratiques de gouvernance. De plus, elles sont soumises à l’examen constant des marchés et des actionnaires, ce qui est supposé limiter les comportements imprudents, notamment en matière d’investissements propres ou de gestion des fonds des clients.

Enfin, il peut être pertinent d’examiner si la banque a déjà fait l’objet de mesures disciplinaires ou d’enquêtes par les régulateurs. Une institution qui a été sanctionnée ou surveillée pour des pratiques douteuses peut indiquer un manque de rigueur dans sa gouvernance ou ses procédures de contrôle interne.

Pour un client, comprendre ces aspects réglementaires et structurels est indispensable. Cela permet de choisir une institution non seulement sur la base de sa réputation ou de ses services, mais également en tenant compte de la solidité de son cadre réglementaire et de la sécurité qu’il procure.

L’existence de produits internes

De nombreuses banques privées conçoivent et proposent leurs propres produits financiers, tels que des fonds communs de placement, des produits structurés ou des instruments dérivés. Bien que ces produits puissent parfois répondre à des besoins spécifiques ou offrir des solutions adaptées à certains objectifs patrimoniaux, ils soulèvent également la question des conflits d’intérêts. Une banque qui développe ses propres produits a naturellement intérêt à les promouvoir auprès de sa clientèle, parfois au détriment d’alternatives externes, potentiellement plus avantageuses ou mieux adaptées aux besoins du client.

Pour cette raison, il est indispensable de s’assurer que la banque communique de manière transparente sur la place que ces produits internes occupent dans son offre. Les clients devraient demander des précisions sur les critères qui motivent les recommandations d’investissement : reposent-elles sur une véritable analyse des besoins et du profil de risque, ou sont-elles influencées par des objectifs commerciaux visant à maximiser les revenus de la banque ? Une telle transparence permet de mieux évaluer l’impartialité et la pertinence des propositions faites par le conseiller.

Par ailleurs, la qualité des recommandations d’investissement dépend fortement des capacités de recherche de l’établissement. Une gestion de patrimoine efficace repose sur une compréhension approfondie et actualisée des marchés financiers. Une banque dotée d’une équipe de recherche solide, composée d’analystes spécialisés, est mieux équipée pour identifier des opportunités d’investissement pertinentes et anticiper les évolutions économiques et sectorielles. Il est donc utile de connaître la taille et l’expertise de cette équipe, ainsi que les ressources qu’elle consacre à l’analyse des marchés.

Poser ces questions permet au client de mieux évaluer la pertinence des propositions d’investissement, mais aussi de s’assurer que ses intérêts passent avant ceux de l’institution.

L’adéquation fiscale

Les implications fiscales des investissements, bien qu’essentielles, sont trop souvent négligées, alors qu’elles peuvent significativement impacter les rendements nets et, par conséquent, les objectifs patrimoniaux à long terme. Une gestion de patrimoine efficace doit inclure une analyse de l’adéquation fiscale des placements proposés. En effet, chaque investissement peut générer des conséquences fiscales spécifiques, parfois complexes, en fonction de la juridiction où réside le client.

L’adéquation fiscale implique que la banque s’assure que les produits financiers qu’elle recommande respectent les obligations fiscales du client, tout en minimisant les éventuelles inefficacités. Par exemple, certains placements peuvent être lourdement taxés dans un pays, alors qu’ils bénéficieraient d’un traitement fiscal plus favorable dans une autre juridiction. Une gestion de patrimoine compétente doit pouvoir identifier ces différences et orienter ses recommandations pour optimiser la situation fiscale du client. Cela est particulièrement important pour les clients disposant d’un patrimoine international ou d’une résidence fiscale complexe.

En Suisse, la FINMA (Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers) a établi que la gestion des risques fiscaux fait partie des responsabilités des banques. Cela signifie qu’une institution financière est tenue d’évaluer les implications fiscales de ses conseils en investissement et d’éviter de recommander des produits qui pourraient se révéler fiscalement désavantageux pour le client. Par exemple, un produit financier générant des revenus imposables à un taux élevé pourrait ne pas convenir à un client soumis à une fiscalité locale stricte, même si le produit semble attractif en termes de rendement brut.

Toutefois, il est important de noter que les banques ne sont généralement pas habilitées à fournir des conseils fiscaux détaillés ou à agir en tant que conseiller fiscal. Leur rôle consiste davantage à s’assurer que les investissements proposés prennent en compte les grandes lignes des obligations fiscales du client et à collaborer, si nécessaire, avec les conseillers fiscaux ou juridiques du client.

Un client prudent devrait donc s’assurer que la banque dispose des outils et des ressources nécessaires pour évaluer l’impact fiscal de ses recommandations.

La gestion de la transmission et de la succession

La gestion de patrimoine ne se limite pas à maximiser les rendements ou à protéger les actifs : elle s’inscrit également dans une perspective à long terme, celle de préparer l’avenir. Parmi les aspects fondamentaux de cette approche figure la gestion de la transmission et de la succession, un enjeu particulièrement crucial pour les clients confrontés à des situations internationales complexes.

La transmission du patrimoine exige une planification minutieuse pour assurer une transition fluide et conforme aux souhaits du propriétaire. Dans ce cadre, une banque privée peut jouer un rôle clé en orientant ses clients vers des solutions adaptées, telles que des produits d’assurance-vie, des fonds dédiés ou des structures juridiques spécifiques (par exemple, des trusts ou des fondations). Ces véhicules d’investissement permettent non seulement d’optimiser fiscalement la transmission, mais aussi de garantir que le patrimoine sera distribué selon les volontés du client tout en réduisant les risques de conflits familiaux.

Par ailleurs, la planification successorale ne concerne pas uniquement la transmission du patrimoine financier. Elle englobe également des aspects plus larges, tels que la préparation des héritiers à gérer le patrimoine transmis, ou encore la mise en place de mécanismes pour garantir la pérennité des entreprises familiales ou des actifs spécifiques. Une banque proactive peut ainsi proposer des solutions éducatives pour les héritiers ou faciliter des discussions intergénérationnelles autour des enjeux patrimoniaux.

Comprendre les frais

Les frais constituent l’un des aspects les plus tangibles de la gestion de patrimoine, mais aussi l’un des moins compris. Il est indispensable de disposer d’une ventilation transparente de tous les frais, y compris les frais de gestion, les frais de transaction et les coûts cachés dans certains produits d’investissement comme les fonds communs. Sur le long terme, même des frais modestes peuvent éroder les rendements, ce qui rend crucial la compréhension des implications financières complètes d’une stratégie de gestion de patrimoine.

Certaines banques peuvent facturer des frais basés sur la performance. Bien qu’ils alignent les intérêts de la banque sur ceux du client, ils nécessitent une évaluation minutieuse pour garantir leur équité et leur transparence. Il est pertinent de demander des explications claires et détaillées sur tous les coûts associés au portefeuille.

La relation avec le conseiller

La relation personnelle entre un client et son conseiller constitue un pilier essentiel d’une gestion de patrimoine réussie. Cette relation repose sur la confiance, qui se développe progressivement au fil du temps et des échanges. Le parcours professionnel du conseiller offre des indices précieux sur sa fiabilité, son expérience et sa capacité à accompagner le client sur le long terme. Par exemple, un conseiller ayant exercé pendant plusieurs années au sein d’une même institution démontre une certaine stabilité, ainsi qu’une connaissance approfondie des processus internes et de la culture de l’établissement. En revanche, des changements fréquents d’employeur peuvent susciter des interrogations sur sa capacité à fournir un accompagnement cohérent et durable.

Un conseiller compétent doit non seulement posséder une expertise technique, mais aussi comprendre pleinement les objectifs financiers, la tolérance au risque et les spécificités personnelles du client. Cette compréhension approfondie permet d’élaborer une stratégie de gestion de patrimoine véritablement sur mesure, qui ne se limite pas à des critères purement financiers mais prend également en compte les ambitions personnelles, familiales et professionnelles du client.

Conclusion

La gestion de patrimoine est bien plus qu’un simple ensemble de services financiers : c’est une stratégie globale qui s’appuie sur la sécurité, la transparence et une planification adaptée aux besoins individuels. En obtenant des clarifications sur ces six questions essentielles, le client peut mieux comprendre les solutions proposées, évaluer leur pertinence, et s’assurer qu’elles correspondent pleinement à ses objectifs.

 

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