Dans un article publié le mois dernier dans le très respectable Stuttgarter Zeitung, on relate ce que l’on peut nommer une « horreur » ; c’est-à-dire une information à cacher de tout œil averti, de tout citadin sensé, de tout citoyen du monde. Des cobayes humains ont été soumis à des inhalations de gaz d’échappement de véhicules légers, avec leur consentement et sous la tendre férule de grands constructeurs automobiles allemands !? Inimaginable, impensable, improbable ? Vous ne rêvez pas !…
C’est la triste réalité et elle n’est malheureusement pas récente. En 2014, on signale que des singes de laboratoire ont été exposés à des inhalations de gaz d’échappement de véhicules de marque Volkswagen (Ne souriez pas : il s’agit de la même marque qui s’est faite épinglée aux USA en 2016 à cause d’un logiciel « truqueur » installé sur ses moteurs Diesel). Serait-on à l’aube d’un nouveau scandale de taille mondiale ? Il est à souhaiter que non. Pour autant, on ne fait désormais plus appel à des animaux mais à des êtres humains : avouez qu’on a franchi le Rubicon… Certains nous diront que les singes n’ont pas leur mot à dire alors que les hommes, eux, sont volontaires ; d’aucun répondront que sur le plan biologique, c’est blanc bonnet-bonnet blanc ! Match nul…
On y apprend que cette étude a été menée en Allemagne durant l’année 2016 sur un échantillon de 25 jeunes hommes, soumis à des inhalations de dioxyde d’Azote (NO2) pendant plusieurs heures !? Pour rappel, ce gaz fait partie de la famille des oxydes d’Azote (NOx), très répandus dans les gaz d’échappement des moteurs thermiques et responsables de pathologies respiratoires & cardiaques avérées. [Remarquez que je n’ai pas prononcé le terme de cancer…]. C’est le Groupe Européen de Recherche sur l’environnement & la santé dans le Transport (EUGT) qui a commandité cette étude scientifique sur la nocivité des gaz d’échappement pour l’homme. On est en droit de s’interroger sur le bienfondé de telles expériences alors que la communauté médicale internationale en a prouvé la terrible nocivité depuis des décennies. De facto, on a le sang qui se glace à l’idée de découvrir d’autres volontaires lors de prochaines « campagnes » d’inhalations ; je propose qu’on inhale des particules fines issues des moteurs Diesel : ça ferait sens, non ?
Le devoir de mémoire nous interdit d’oublier les pratiques inqualifiables des médecins nazis qui s’ingéniaient à administrer aux déportés toutes sortes de substances nocives & mortelles, dans le but de parfaire leurs connaissances… Avilissant, écœurant, révoltant ! Cette étude nous renvoie l’image d’une « démocratisation » de l’horreur ; un de ces trucs qui appartiendrait désormais à la famille du banal. De fait, on est en droit de s’interroger sur la suite qu’on imagine encore plus terrifiante : à quand de nouveaux volontaires pour se faire transfuser à l’huile de palme ou pour ingurgiter des infusions de Glyphosate ? Voilà un bref échantillon des futurs sujets d’investigations pour Emmanuelle Perrenoud & son équipe d’ABE : on en salive par avance devant notre téléviseur…
Trêve d’humour noir : l’affaire est grave mais le silence qui l’entoure, encore plus ! « Qui ne dit mot, consent » entend-t-on de coutume : se trouverait-on dans ce schéma de pensée consensuel mais ô combien réducteur ? Ou serait-on confronté à une omerta de circonstance, eu égard aux intérêts financiers colossaux qui se cachent derrière ? La question est posée. Dans notre domaine d’activité, il nous arrive d’ironiser sur le constat que tant qu’il y aura une goutte de pétrole sur cette planète, tout sera mis en œuvre pour l’exploiter et rien ne pourra l’entraver. Sur le ton du « plus j’le dis, moins j’y crois », la triste réalité fait sens jour après jour, année après année… Pas très rassurant, hein ?
Ce 30 janvier, la Commission Européenne a sermonné les ministres de l’Environnement de neuf pays considérés comme mauvais élèves en matière de qualité de l’air. « Cela fait neuf ans que ça dure ; c’est la dernière fois !» a-t-elle déclaré. En France voisine, la pollution automobile serait responsable de quelque 45’000 décès prématurés par an ; on ne vous parle même pas du nombre de ceux non « prématurés ». Solutions avancées : réduire le trafic automobile, développer la voiture électrique, instaurer des zones de circulation restreinte. Autre chose ? Sur le papier, ça semble rouler ; dans la réalité socio-économico-financière, ça va coincer…
En Suisse, même si le civisme est de mise, les habitudes sont tenaces et le mode de vie bien ancré. Qui est près à renier son doux confort helvétique alors qu’il se construit 3 centrales à charbon par mois en Chine, qu’il s’extrait des millions de m3 de gaz de schiste au pays de Donald, que la Lignite a supplanté l’atome dans la production d’électricité en Allemagne ou que le charbon tue chaque année 1 million de personnes en Inde ?!… Il est vertueux de s’astreindre au changement, louable de balayer devant sa porte ; encore faudrait-il qu’elle ne soit pas « communicante » sur le monde, ça donnerait tellement plus de sens à l’action citoyenne.