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Thomas Hug – Directeur artgenève
Monde Economique: Initiée par artgenève et réalisée en collaboration avec le MAMCO et la Ville de Genève, la prochaine édition de la Biennale de Genève Sculpture Garden donnera son coup d’envoi dans quelques jours. Comment se présente cette troisième édition ?
Thomas Hug: Avec cette troisième édition, je crois pouvoir déjà dire que nous poursuivons le développement de la biennale vers une manifestation plus internationale au niveau de sa programmation. Avoir fait appel à Devrim Bayar, curatrice au WIELS Bruxelles, s’inscrivait dans cette stratégie. Aussi, le champ des secteurs artistiques abordés s’ouvre. Au-delà de la sculpture, un programme de vidéo sera aussi proposé. Ceci va dans le sens de la construction d’une biennale d’art contemporain de Genève plus globale.
Monde Economique: On se souvient de la biennale de Venise, celle de New-York ou même celle de Berlin. Quelle est la particularité de la Biennale de Genève ?
Thomas Hug: Difficile de comparer. Chaque biennale à travers le monde offre à chacune de ses éditions une particularité et n’a pas nécessairement de ligne de conduite immuable sur le long terme. Le registre des artistes démarchés me semble particulièrement attractif : nous partageons avec le grand public beaucoup de jeunes créateurs et créatrices ainsi qu’un grand nombre d’œuvres d’un niveau de conceptualisation élevé. Quoi qu’il en soit, Sculpture Garden paraît être une manifestation assez unique en suisse, grâce notamment aux splendides parcs intégrés dans lesquels elle se déploie et situés au centre-ville : un écrin estival rare.
Monde Economique: La conception de l’exposition a été confiée à Devrim Bayar qui a rassemblé 26 œuvres, dont plus de la moitié sont produites spécialement pour l’évènement. Après l’exposition, que deviennent ces œuvres créées ?
Thomas Hug: Les œuvres connaissent différentes destinées suite à l’exposition : elles peuvent retourner à l’artiste ou à la galerie, et même parfois être détruite pour des œuvres plus éphémères. Mais la dynamique plus constructive que nous avons mise en place dès 2020 est celle de leur intégration de manière pérenne dans l’espace public des communes genevoises. Ainsi, au fil du temps, le canton de Genève s’enrichit d’un vaste parc d’art public de qualité internationale.
Monde Economique: Au début du siècle, trois rendez-vous incontournables – Venise, Paris et Sao Paulo – faisaient paisiblement voyager les amateurs d’art autour du globe. Aujourd’hui, on ne compte plus le nombre de biennales d’art dans le monde. Comment s’y retrouve-t-on dans cette cadence infernale ?
Thomas Hug: Il est en effet parfois difficile de suivre l’entièreté de la proposition internationale, surtout dans cette période post COVID, où chacun souhaite exister, mais il ne faut pas oublier que le public intéressé c’est aussi énormément élargi et diversifié au fil des décennies. Cette grande offre permet aux amateurs et amatrices d’art de se diriger vers des manifestations affichant chacune une réelle identité et singularité.
Monde Economique: Les transactions réalisées au cours de l’année qui vient de s’écouler ont atteint 2,7 milliards de dollars ; démontrant une fois de plus que le business de l’art mondial ne connaît pas la crise ! Qu’est-ce qui rend le marché de l’art d’aujourd’hui si différent et si séduisant ?
Thomas Hug: Il me semble qu’avec l’art contemporain, nous nous situons dans une valeur encore plus forte que celle de la production du luxe, dans la mesure où les objets créés sont généralement uniques. De plus, l’art est souvent guide de progrès pour d’autres domaines, tel le design et la science. Ce double intérêt de valeurs réelles et attractives me paraît être la clé du succès.
Monde Economique: L’arrivée des NFT va certainement bousculer les équilibres du marché de l’art (physique). Certains y voient une opportunité et d’autres s’en méfient. Pour vous, les NFT sont-ils une pure spéculation ou une réelle révolution ?
Thomas Hug: Pour moi, les NFT sont une évolution absolument passionnante et un enrichissement aux vecteurs du marché de l’art ainsi que pour l’atteinte d’un autre public. Je ne pense en revanche pas que le bouleversement qu’ils produisent soit plus impactant par exemple que la place qu’a pris le Street Art et son effet sur la démocratisation de l’art il y a quelques années de cela dans notre milieu.
*Interview réalisée par Thierry Dime, Directeur de publication du Monde Economique
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