Interview Vincent Blanc: Les entreprises ayant un taux d’absentéisme bas ont un climat de travail favorable au développement des relations

19 janvier 2017

Interview Vincent Blanc: Les entreprises ayant un taux d’absentéisme bas ont un climat de travail favorable au développement des relations

Monde Economique Le nombre de jours d’absence par salarié n’a cessé d’augmenter ces dernières années et les spécialistes n’entrevoient pas encore l’arrêt de l’hémorragie. L’absentéisme au travail est-il un fléau social difficile à endiguer?

Vincent Blanc Dans le contexte actuel, il est difficile d’endiguer l’absentéisme car généré par des facteurs externes eux-mêmes complexes à réfréner: réduction des coûts des prestations et des frais, optimisation et efficience forment l’incubateur des absences. Mais si l’entreprise comprend que sa performance dépend de la santé et de l’épanouissement de ses collaborateurs et si elle met en place des conditions pour améliorer le bien-être, il est possible à faire baisser.

Monde Economique Leader Suisse en climat social, Ismat Group intervient depuis plus de 10 ans dans les entreprises implantées en Suisse et à l’étranger.

Partant de votre expertise, quelles sont les raisons du malaise des salariés?

Vincent Blanc Ce malaise est notamment dû à la charge de travail toujours croissante et aux pressions qui en découlent. Si vous ajoutez à cela des relations tendues entre collaborateurs ou avec le manager, vous avez un cocktail idéal pour générer le malaise et altérer le climat. Conjointement à cela, les salariés ont des attentes de plus en plus fortes concernant l’équilibre vie privée/vie professionnelle et leur bien-être et sont exigeants sur les aspects du plaisir au travail.

Monde Economique Sanctionner l’absentéisme, tout comme récompenser les personnes présentes reste une solution à court terme et ne résout rien sur le fond.

Est-il difficile de renverser la tendance une fois que le phénomène est installé?

Vincent Blanc Les absences engendrent les absences! Mais si l’entreprise prend la mesure, au moyens d’indicateurs (analyse d’absences, cartographie des risques psychosociaux, étude des conditions de travail), de la situation de ses collaborateurs, elle peut inverser cette tendance en mettant en place une politique de bien-être et performance et démontrer en quoi elle exerce sa responsabilité sociale et sa durabilité. Cela doit partir d’une réelle volonté de changement. Il faut comprendre que l’on parle en réalité de risk management et d’investissement à long terme.

Monde Economique Quelle que soit l’importance de l’absentéisme dans une structure, il y toujours des raisons qui expliquent une absence. Il semble pertinent d’agir au cas par cas.

Quelles sont aujourd’hui les solutions qui ont un meilleur taux de réussite?

Vincent Blanc Les entreprises ayant un taux d’absentéisme bas ont un climat de travail favorable au développement des relations, une politique de santé efficace et des managers formés en management et aux risques. Celles qui performent ont des employés qui ont du plaisir à venir travailler, une culture orientée consultation et autonomie sur les décisions impactant le travail, partagent bien l’information, favorisent le respect et le soutien tout en développant les compétences de leurs collaborateurs grâce à une pratique régulière du feedback sur la performance. Pour tout cela, les entretiens annuels ne suffisent pas! Les dirigeants et managers peuvent créer une culture d’entreprise favorisant le bien-être sans investissements financiers énormes à travers des feedbacks réguliers. Dans un bon climat, cette qualité de la relation contribue à réduire les risques de burnout, de stress, d’absentéisme ou de désengagement.

Monde Economique

La mise en place de nouveaux outils de management est-elle nécessaire pour la bonne réussite des solutions que vous préconisez?

Vincent Blanc Les managers de proximité, de par leur position intermédiaire, sont les premiers acteurs de santé au travail et dans la prévention des risques humains ; c’est pourquoi ils doivent être formés à déceler tous signes avant-coureurs d’absence ou de mal-être chez leurs collaborateurs. Leurs décisions et attitudes impactant directement les membres de l’équipe, ils jouent un rôle capital dans la protection de ceux-ci et doivent à ce titre, détenir de réelles compétences et outils dans la conduite d’équipe et dans la gestion de leur propre stress. C’une l’une des clés de succès.

Monde Economique Les coûts engendrés par l’absentéisme se chiffrent chaque année en Suisse en milliards de francs et les primes d’assurance ne cessent d’augmenter.

Quel est le bon taux d’absentéisme ?

Vincent Blanc Il n’y a pas de bon taux : derrière les chiffres, il y a toujours des absents et des jours maladie. On peut toutefois dire qu’il existe un taux « admissible » qui serait incompressible. Il varie en fonction du secteur économique de l’entreprise, entre 1 et 4 %, car il dépend de la pénibilité directement liée aux emplois et au secteur. En effet, il est différent de travailler avec des objets de luxe, comme un grande marque, ou avec des délinquants dans un service publique sensibles par exemple! Dans ce cas, seul une refonte complète des conditions de travail et contrats permet de s’affranchir des risques élevés de développer des absences.

Vincent Blanc

Directeur Général

Ismat Consulting SA

 

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