Isabelle Harsch ou l’art de savoir « nommer les choses »…

10 juillet 2023

Isabelle Harsch ou l’art de savoir « nommer les choses »…

Par Charles Bechar

Déménagements, archives, transport d’objets d’art. Depuis plus de 60 ans, l’entreprise genevoise Harsch s’est forgé une réputation de sérieux et de qualité dans un secteur d’activité très concurrentiel. Le management d’Isabelle Harsch qui en a repris la direction en 2015, n’y est pas pour rien.

Contrairement à ce que l’on peut croire, Isabelle Harsch n’est pas ce que l’on peut appeler une héritière. Certes, elle a repris en 2015 des mains de son père, le flambeau de l’ancestrale entreprise familiale de déménagement, mais il ne s’agit en cas d’un héritage, puisqu’elle a payé la société qu’elle dirige aujourd’hui, à la faveur d’un prêt… qu’elle rembourse encore.

Dans cette démarche fondatrice, on retrouve déjà tout ce qui fera la marque de fabrique de cette jeune cheffe d’entreprise de 35 ans : le goût de l’équité, en particulier vis-à-vis de ses frères et sœurs qui ont choisi d’autres voies professionnelles, mais aussi un penchant très prononcé pour l’indépendance et la liberté. Des qualités que son père perçoit très tôt, lui laissant entrevoir qu’un jour, après lui, elle serait capable de maintenir sa société dans le giron de la famille. Il faut dire que la jeune enfant exprime un attachement très fort à l’entreprise paternelle, y passant volontiers ses week-ends à… jouer dans les dépôts.

Études de droit

Cet attachement, ainsi que l’envie d’en reprendre un jour la direction, bien que perceptible par tout l’entourage, la jeune femme ne les exprimera ouvertement que bien plus tard et c’est lors d’un séjour d’études Erasmus à Berlin qu’elle prend sa décision : « Le lieu et le moment étaient propices à une prise de décision en toute liberté et loin de toute influence », raconte aujourd’hui celle qui a suivi des études de droit, un choix parfaitement assumé car il lui a permis de développer « une aptitude à la vision synthétique des situations ».

A 28 ans, la voici donc propulsée à la tête d’une PME de près de 150 personnes, dans un secteur d’activité, le déménagement, passablement chahuté. Et très rapidement, elle met ses qualités personnelles au service d’un mode de management plus moderne et plus horizontal. « Je ne surjoue pas mon rôle de dirigeante et je suis tout à fait capable d’admettre quand je ne sais pas ou quand j’ai fait une erreur, explique-t-elle. Et puis, même si je sais prendre des gants, je n’hésite pas à être directe quand il le faut, cela rassure les employés car ils se sentent responsabilisés ».

Alors, quand l’entreprise connaît des difficultés, Isabelle Harsch n’hésite pas à les partager avec son personnel sur lequel elle repose volontiers. « Quand cela ne va pas, il vaut mieux communiquer et nommer les choses, car impliquer les autres est le meilleur moyen d’améliorer la situation » lance-t-elle, avant d’ajouter : « quand je suis arrivée à la tête de l’entreprise, j’étais jeune et relativement inexpérimentée. Le meilleur moyen d’avancer et d’apprendre était donc de me fier à mes collaborateurs, avec lesquels j’ai vite pris l’habitude d’interagir pour prendre de meilleures décisions ».

Style et vision

Progressivement, et durant les premières années grâce à l’accompagnement et le soutien bienveillant de son père, hélas décédé depuis, Isabelle Harsch imprime peu à peu son style et sa vision. Pas question de toucher aux fondamentaux de l’entreprise, il s’agit plutôt de les renforcer : maintenir une qualité de service exemplaire au bénéfice d’un marché suisse dont elle connaît toutes les finesses, conserver le cœur de métier en se basant sur les infrastructures et les ressources propres de l’entreprise, à contre-courant pourtant de la tendance lourde du moment, qui consistait à sous-traiter à tout va. « Les fondamentaux étaient sains avec un véritable savoir-faire fondé sur la passion, un business model éprouvé et une réputation incontestable. A ce moment-là, il fallait surtout faire le dos rond, le temps que la conjoncture s’améliore ».

Ce qui n’empêche pas la CEO d’innover, en favorisant le développement régional de l’entreprise dans le canton de Vaud et en Suisse alémanique, mais aussi par une politique d’acquisitions destinée à améliorer le savoir-faire et élargir le portefeuille de clients. « Pour rester un acteur de qualité, il faut beaucoup travailler pour se maintenir, comprendre dans quelle direction les services vont se développer et les anticiper, conclut la jeune femme. C’est le secret de la survie dans un secteur très concurrentiel ».

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