La « répétition » n’est-elle pas le propre du travail et en même temps la source des réserves formulées à son égard?

Le travail se présente ici non comme une œuvre unique, individuelle et irrépétable, mais, bien au contraire, comme une pratique inscrite dans une logique de répétition : demain on travaillera de nouveau à condition que l’inspiration vienne ou revienne…

Ici il peut y avoir « une prochaine fois »…Ou « il était une fois »…

Tout ce qui se répète chez le salarié, n’est-il pas considéré comme faible sur le plan existentiel au travail ?

Cette répétition-là n’invite-t-elle pas justement à assimiler l’entreprise à un laboratoire expérimental ou l’on apprend sur ses comportements ?

Le travail, en raison même de la répétition, est à même de s’améliorer et pas seulement de se dégrader comme le craignent certains, et déplore cette inévitable chute, tandis que, chez d’autres, c’est l’espoir d’y résister qui les anime.

« La prochaine fois », ne nous entraîne pas sur la pente d’une détérioration inéluctable ; le travail se répète mais en même temps il se déploie dans des cycles de certitudes et d’incertitudes. Et c’est de cette énigme que provient l’attrait qu’il procure et la nécessité de la répétition. Il tient du réel autant que du songe, cet intervalle entre les deux est l’essence même du sens et de la conscience du travail.

Et dans sa matérialisation, il nous séduit dans la mesure où il nous trompe, nous déroute. Depuis son bureau, peut-on se demander à quelle expérience a-t-on participé ? Vécu ou rêvé avoir été confondu ?

La disparition de l’inspiration peut associer le travail au rêve, les deux dépourvus de preuves ; le travail serait-il dès lors qu’une rêverie partagée ?

Lorsqu’il ne nous reste rien dans les mains, comment avoir la preuve de ce que l’on a éprouvé ? A-t-il été bien réel ou fut-ce seulement un rêve ?

Le client fait l’expérience des songes. Et le travail en est l’accoucheur.

L’entreprise, expérience de l’incertitude, soutenue par la répétition, conduit à partir de l’imagination de chacun, aux rêves et aux visions à venir ; nul doute, le travail est bien d’ici et d’ailleurs.