LE DIFFICILE CHEMIN DE L’ECONOMIE VERS L’ECOLE

16 novembre 2016

LE DIFFICILE CHEMIN DE L’ECONOMIE VERS L’ECOLE

  • L’économie à l’école – voilà un sujet bien délicat. On ne peut pas l’évoquer sans penser à la confrontation latente qui existe entre le monde économique et les « humanités », ces dernières ayant de tout temps considéré l’école et l’académie comme leurs bastions les plus forts et les plus sûrs. La dominante littéraire et historique reste indétrônable, comme d’ailleurs l’a montré, il y a quelques années, l’exemple français : intégrée une fois dans le programme scolaire, l’économie a été supprimée en 2009 pour ne réapparaître que récemment mais seulement comme matière facultative à étudier. Décidément, la République des Lettres, cet Etat dans l’Etat que représentent pour la France ses puissantes élites intellectuelles, considère comme une véritable hérésie toute science traitant de la question de l’argent et de la gestion des finances, fût-elle la gestion du budget personnel ou familial.
  • Avec un enseignement qui exclut ou n’intègre que très peu l’économie, le cursus scolaire prépare mal les jeunes gens aux défis et aux grands enjeux de leur existence et finit par les déconnecter des réalités concrètes. Les tenants de l’« économie à l’école » ont beau insister sur la nécessité d’éclairer les jeunes gens sur les mécanismes économiques fondamentaux : la réticence des responsables de l’enseignement secondaire reste grande à l’égard de tout ce qui touche la question épineuse de l’argent. Prenant en vue aussi la tenace volonté de bannir de l’école le système des notes, on peut se demander si l’on n’assiste pas à une tendance plus large de désaveu de tout ce qui est mesurable, pondérable et en fin de compte objectivable. Certes, restent les mathématiques mais là – non !, on n’y touche pas, on ne simplifie même pas cette matière souvent si dure, les inévitables maths étant vues – et cela malgré les chiffres par lesquels elles s’expriment – comme une science abstraite, appartenant au même tronc classique d’où sont issues les sacro- saintes « humanités ».
  • On préfère ignorer le fait qu’un enseignement de l’économie dans le secondaire développerait, bien mieux que ne peuvent le faire les maths, le raisonnement logique des jeunes gens – sans parler de l’approche pratique et efficace des choses qu’il leur donnerait, du goût de l’initiative et de la volonté d’une meilleure gestion du temps qu’un tel enseignement peut procurer faisant de ces jeunes de futurs citoyens éclairés et responsables. L’économie étudiée sérieusement comme matière scolaire peut également remédier d’une manière ou d’une autre à des problèmes spécifiques à la catégorie des 18- 25 ans tels que le chômage et l’endettement (le surendettement).
  • Il ne s’agit pas d’enseigner aux élèves du secondaire des choses compliquées mais de leur expliquer des notions de base : gestion du budget personnel ou familial, notions liées au cours de la monnaie, aux prêts, à la formation des prix, à la concurrence, au PIB, au jeu de l’offre et de la demande, aux marchés financiers. Ainsi initiés, un jour ces « jeunes » seront, comme le souligne X. Huillard pour FigaroVox, plus enclins à soutenir les réformes nécessaires à l’économie nationale, et moins perméables à des raisonnements idéologiques et à des théories du genre « mort au capitalisme ». Ces théories ne mènent finalement à rien et finissent par rendre les citoyens encore plus dépendants de l’Etat… capitaliste.

Il serait intéressant d’associer à l’avenir le monde des entreprises aux éventuels projets d’enseignement de l’économie à l’école. En Suisse, de tels projets conjoints ont déjà vu le jour : Young Enterprise Switzerland (YES) avait dispensé des cours d’économie au secondaire avant que son louable élan soit arrêté par la suspicion et la méfiance. Le cours fut en effet interrompu suite à la plainte des parents d’un seul élève opposés à la participation indirecte de partenaires privés dans cette initiative (le YES étant soutenu par de tels partenaires : source – le blog de C. Amstein).

C’est dans un tel climat de méfiance que l’économie essaie de se frayer le chemin vers les jeunes. Mais on pourrait dire sans trop exagérer qu’aussi longtemps que l’enseignement sera déconnecté des réalités économiques, aussi longtemps l’école sera éloignée des réalités de la vie – et dans une époque de grandes et rapides transformations, cela peut créer de réels dangers.

 

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