Les femmes et l’argent

1 décembre 2011

Les femmes et l’argent

Marilyn Monroe s’exclamant que les diamants sont nos meilleurs amis, Julia Roberts en Pretty Woman paradant sur Sunset Boulevard après avoir dévalisé les plus belles boutiques (ah, l’effet de baguette magique de la carte de crédit !), sans parler des coquettes extravagantes de la littérature des siècles derniers… Les stéréotypes ne manquent pas pour nous dépeindre en dépensières incorrigibles, avides d’argent jusqu’à ruiner les hommes, pauvres victimes, que nous semblons sommer de nous inonder de cadeaux.

Inutile de le nier, les femmes et l’argent, c’est parfois une grande histoire d’amour. Cependant, les temps ont changé.

À présent que nous avons grimpé les échelons de la société et du monde du travail, nous aimons surtout gagner ‘notre’ argent, avant de le dépenser avec plaisir – ou pas. En effet, les statistiques se bousculent pour démontrer que les femmes sont souvent plus conservatrices et meilleures gestionnaires que les hommes lorsqu’il s’agit du budget. Une étude récente révèle que plus de 60% des hommes voient en l’argent une manière de s’affirmer et d’obtenir une plus grande liberté (l’exemple-clé étant, pour eux, l’achat d’une voiture de sport), tandis que 74% des femmes considèrent l’argent avant tout comme un gage de sécurité, préférant l’épargner pour les cas de force majeure.

La sécurité avant tout

Le contraste est éloquent, et pourrait peut-être expliquer pourquoi, jusqu’ici, les femmes se sont montrées beaucoup plus frileuses que les hommes en termes d’investissements ou de gestion de leur patrimoine. Si nous excellons à épargner notre argent et à le préserver, nous sommes bien moins ambitieuses à le faire fructifier. Que celles qui, au Monopoly, choisissaient immanquablement le dé à coudre comme pion au lieu de la voiture de course, et perdaient tous leurs billets soigneusement empilés dans les hôtels que leurs frères avaient eu la bonne idée d’acheter alors qu’elles ne voulaient rien dépenser, lèvent la main ! Là aussi, la génétique apporte une réponse intéressante : les taux plus bas de testostérone des femmes les rendent plus hésitantes, moins prônes à prendre des risques que les hommes.

Les banques l’ont bien compris, et offrent de plus en plus de programmes d’investissement ‘sur mesure’ aux femmes, se concentrant sur les obligations ou les fonds de pension, les plans de succession considérés comme des options à faible risque pour leurs clientes qui tiennent à assurer leur avenir ou celui de leur famille. Ces ‘placements de bons pères de famille’ (encore un cliché dépoussiéré!) gagnent en popularité auprès des femmes dans toute l’Europe, et peut-être représentent-ils les premiers pas de ces dernières dans les marchés financiers, dont la volatilité et le manque de clarté les ont laissées méfiantes jusqu’à présent.

Du tangible plutôt que du visible

Lorsque les femmes investissent, néanmoins, elles se révèlent souvent douées et avisées… dans leurs propres choix. Ainsi, de plus en plus de femmes décident d’acheter des grands crus de vin ou de l’or en tant qu’investissements plus sûrs, acquièrent des obligations auprès des grandes maisons de mode ou de luxe, et se lancent dans des collections d’art. Cette dernière orientation a certainement le vent en poupe ces dernières années, favorite des stars telles que Madonna, Angelina Jolie ou Vivienne Westwood, qui investissent quelques (remorques de) dollars dans des œuvres d’art dont elles espèrent bien récolter les fruits dans un avenir plus ou moins proche. Ces choix d’investissement au féminin ont le point commun, et l’avantage face à la complexité des transactions en bourse, de représenter des avoirs tangibles plutôt que tapageurs. Les œuvres d’art, quant à elles, sont aussi appréciables au moment présent, et permettent parfois aux collectionneuses enthousiastes de créer un lien personnel avec un artiste qu’elles ont la satisfaction de soutenir dans son projet créatif.

Solidarity, sister !

Cet aspect personnel se retrouve encore dans les initiatives de certaines ‘business angels’ ou d’investisseuses dans des projets de commerce équitable ou des sociétés des pays émergents. Les femmes sont, ici aussi, plus nombreuses que les hommes à oser miser sur des entreprises qui répondent à leur engagement dans la société. Que ce soit par le micro-crédit ou le financement de causes humanitaires, les femmes font plus facilement parler leur solidarité lorsqu’elles jouent les banquières. Sachant que 70% des pauvres sur terre sont des femmes, on pourrait y voir un réel désir d’aider leurs sœurs de fortune. Au milieu de la relève de la plus importante crise économique que notre génération ait connue, ces choix peuvent certainement nous apporter de l’espoir, et pourquoi pas, de l’inspiration…

Marie Gabriel – Rédactrice chez Le Monde Economique

 

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