Par Dessy Damianova
Dans les années 80 et 90, le milliardaire était une figure rare et plutôt isolée. Mises à part les exagérations fréquentes qui font facilement d’un homme très riche un « milliardaire », on comptait dans le monde, au tout début de la décennie 90, seulement 25 individus de cette espèce, l’avant- dernière (24-ème) place du classement de la fortune de 1991 étant timidement occupé par un informaticien, un certain Bill Gates…
Les milliardaires représentaient une espèce rare, mais, comme il s’est très rapidement avéré, nullement en voie de disparition. Déjà à l’aube des années 2000 et surtout grâce à l’Internet, leur nombre a carrément explosé.
Le début de l’ère numérique allait voir aussi l’informaticien cité plus haut prendre la tête du classement de la fortune pour y régner, indétrônable, dans les vingt années à venir, et même au-delà. Eh oui, avec Bill Gates désormais en tête des « Top » établi par Forbes, c’était toute une nouvelle tendance qui allait s’affirmer: les hommes les plus riches du nouveau millénaire allaient être des entrepreneurs IT, des visionnaires, des inventeurs futuristes.
Une autre tendance se dessinait aussi qui allait se confirmer dans les années suivantes : les nouveaux milliardaires allaient être beaucoup plus riches que leurs prédécesseurs. Alors que Sam Walton, classé l’homme le plus riche de l’année 1991, possédait 21 milliards, chez Jeff Bezos, le champion de la fortune de 2020, le nombre que suivent les emblématiques neuf zéros est bien 113. Dans un monde où 1% de la population terrestre a mis la main sur près de la moitié des richesses planétaires, la fortune des plus nantis atteint des montants comparables au PIB ou aux budgets de certains pays de l’Afrique, de l’Amérique latine ou encore de l’Europe de l’Est !
De quoi éprouver une véritable nostalgie pour les milliardaires du siècle passé dont l’extravagance ne résidait pas dans les chiffres – même si les milliards sont toujours des milliards – mais surtout dans leur style de vie, dans leurs aventures amoureuses et leurs frasques de toutes sortes.
Les « nababs » d’antan fascinaient par leur côté purement humain, par leur aspect de grands garçons ayant réussi à réaliser leurs rêves et qui sont prêts à partager le secret de leur réussite avec la premier venu qui le leur demande. Ces magnats laissaient flotter autour d’eux un certain sentiment de familiarité avec les gens lambda, un sentiment qui permettait à tout un chacun de se retrouver en eux et de voir s’y refléter un peu de son propre « moi », bien que dans une version magnifiée et sublimée.
Certes, nous schématisons un peu… Il est pourtant vrai que les « anciens » milliardaires faisaient de leurs milliards un grand spectacle, un show aux allures « playboy » et « jet- setters » d’où les accents romantiques n’étaient non plus absents. Les dix mille roses que l’industriel allemand Gunter Sachs avait envoyées par hélicoptère à la star française Brigitte Bardot en 1966 sont restées légendaires, de même que les croisières méditerranéennes que l’armateur grec Aristote Onassis organisait à la fin des sixties et début des années 70, invitant à bord de son luxueux yacht « Christina » des célébrités comme Ava Gardner, Winston Churchill, Maria Callas et cette veuve Kennedy qui, au grand dam d’une Amérique scandalisée, devenait, en 1968, Madame Onassis.
Dans les « années argent », à savoir la décennie 80, a émergé un nouveau type de milliardaire : le « milliardaire beau gosse ». L’incarnation en Europe de ce fonceur irrésistible et un brin « impitoyable » (pour reprendre le terme de la célèbre chanson par laquelle commençait chaque série de « Dallas ») était l’homme d’affaires français Bernard Tapie. Le pendant américain du beau ténébreux Tapie se distinguait, quant à lui, par une éclatante blondeur. C’était un promoteur immobilier du nom de … Donald Trump. Eh oui, le même. Bien avant de devenir le président qu’aujourd’hui on aime tellement haïr (y compris pour ses cheveux !), Trump était la coqueluche des médias du monde entier qui ne se lassaient pas de célébrer la combinaison unique, chez lui, d’une fortune à neuf zéros avec une jeunesse insolente et un physique plus qu’avantageux…
Y a-t-il une rivalité aujourd’hui, sur le sol américain, entre les milliardaires de l’ère numérique et ceux qui, comme Trump, avaient accumulé leur richesse dans les années 80 et 90 du siècle passé ? Oui et non. Le président Trump connu pour son impulsivité et son attitude belliciste à l’égard de ceux qu’il considère comme ses ennemis, n’a jamais sérieusement attaqué les Géants du Net. Quant aux dirigeants de Google, Apple, Facebook et Amazon, après s’être rangés du côté de Hillary Clinton lors de la dernière campagne présidentielle, ils ont fait preuve, tout au long du mandat du Trump, d’une attitude ambiguë à l’égard du président- milliardaire – une attitude qui pourtant n’excluait pas la bonne disposition et même une certaine connivence.
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