Par Yves-Laurent Dübi
Pas si simple de reparler de notre système suisse des 3 piliers. Je vais m’y risquer aujourd’hui, car la Suisse a été l’un des pays précurseurs avec son système de retraite, social et efficace. Le 1er pilier, l’AVS, a vu le jour en 1948, l’AI en 1960, suivi par le 2e pilier en 1985 et le 3e pilier en 1987. Le but : garantir le maintien du niveau de vie en cas d’invalidité, de décès et à la retraite. Avec 11 révisions, l’AVS a su s’adapter. La rente AVS maximale simple de 40 CHF par mois de l’époque se situe maintenant à 2 390 CHF et à 3 585 CHF pour un couple. Les cotisations des travailleurs salariés et des indépendants représentent env. 80 % du financement, la confédération env. 20 %.
Les actifs financent la plus grande part des rentes des retraités, c’est le pacte des générations. Malgré une fortune globale supérieure à 45 Mia CHF, les dépenses excèdent les recettes (-1.17 Mia en 2019) et les caisses risquent d’être vides en 2030. Le nombre de retraités augmentant plus vite que le nombre d’actifs, des adaptations du financement de l’AVS sont urgentes et font l’objet du projet de réforme AVS21.
Le 2e pilier est un système de capitalisation pour la propre retraite de l’employé, ses couvertures d’invalidité et de décès. Employés et employeurs cotisent paritairement. Jusqu’en 2002, les capitaux épargnés bénéficiaient d’un intérêt minimal de 4 % garanti. Ce taux fixé par le conseil fédéral était inférieur à 3 % en 2004, il est de 1 % aujourd’hui avec pour conséquence une réduction massive des capitaux à la retraite. Le taux de conversion pour transformer le capital en rente de retraite LPP était de 7,2 % en 1985. Avec l’augmentation de l’espérance de vie d’environ 7 ans, le taux actuel de 6,8 % est encore trop élevé, les caisses de pensions se basent déjà sur un taux de 6 %.
Pour un salaire moyen de 4 000 CHF en 1985, qui correspond à 6 000 CHF en 2021, le cumul des prestations AVS et LPP permettait de percevoir env. 83 % de son dernier salaire contre 66 % aujourd’hui. Pour un revenu de 8 300 CHF par mois, on parle de 58 % sans tenir compte de la baisse du taux de conversion qui interviendra certainement ces prochaines années. De plus, les cotisations d’épargne durant les dernières années de carrière sont les plus chères, 18% du salaire assuré pour les 55-65 ans contre 7% pour 25-34ans, plus les coûts du risque. Les actifs dès 50 ans retrouvent difficilement du travail, essentiellement en raison de ces coûts. Alors, que faire ?
Ce n’est plus une question, les 1er et 2e piliers ont besoin de réformes, la situation actuelle et future des retraités n’est plus satisfaisante. La LPP n’a eu qu’une seule révision en 2004/2006, le projet de prévoyance 2020 a été rejeté par le peuple en 2017. Certes, cela n’aurait pas réglé le problème des retraites pour le futur, mais cette première révision aurait pu ouvrir la porte à un système mieux adapté aux besoins actuels. Les pouvoirs politiques ne sont pas parvenus à s’entendre et convaincre la population suisse, préférant batailler pendant près d’un an pour une augmentation de la rente AVS de 70 CHF par mois. Il est visiblement encore trop difficile en Suisse de concilier des réformes impopulaires mais nécessaires avec des considérations électorales.
Pour combler ces lacunes et garantir un bon niveau de vie à la retraite, la prévoyance individuelle reste la meilleure solution et le gouvernement le sait. L’État a depuis toujours considéré que les Suisses doivent se responsabiliser et combler leur manque à gagner individuellement grâce au 3e pilier. La prochaine étape devrait être l’adaptation du plafond de cotisation maximal du pilier 3a.
En tant qu’expert en prévoyance et patrimoine, mon travail consiste à apporter des stratégies de mise en place de solutions de prévoyance fractionnées dans le temps car la situation de mes clients évolue. S’offrir une belle retraite est bien plus facile que ce que l’on peut s’imaginer.
à propos de l’auteur
Yves-Laurent Dübi, Expert en prévoyance et patrimoine,
Manager d’Agence pour FCG.
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