Photo Nicolas Besson © REYL
Par Nicolas Besson, Directeur des investissements auprès de REYL Intesa Sanpaolo
Soutenue en particulier par les États-Unis, l’économie mondiale reste manifestement robuste. Elle est principalement boostée par une forte activité dans le secteur des services. Dans ce cycle vraisemblablement atypique, nous continuons à anticiper un atterrissage conjoncturel en douceur sans accident récessionniste, suivi d’une nouvelle accélération tout au long de 2025, notamment portée par une amélioration du secteur manufacturier. Les mesures reflationnistes et pro-croissance seront encore exacerbées par le programme de Trump et devraient renforcer la dynamique positive du cycle. Les divergences régionales persisteront en tout cas pour un temps, en particulier en Europe, qui connaît actuellement une croissance anémique ainsi qu’en Chine, qui présente encore des vulnérabilités qui la pousseront inexorablement à devoir mettre en place des réformes plus significatives qu’envisagé jusqu’ici.
Le revers de la médaille, ce sont les effets pervers que ces politiques peuvent induire. Nous identifions deux risques principaux pour l’année à venir : le redémarrage de l’inflation et les dérapages budgétaires. Il existe un troisième risque « contrariant » qui n’est plus pris en compte par la plupart des investisseurs aujourd’hui : une récession de l’emploi aux États-Unis. Si le marché a très rapidement intégré ce que « Trump 2.0 » devrait impliquer pour l’année à venir, ce ne sont à ce jour que des spéculations. La réalité pourrait s’avérer bien plus compliquée et inattendue que prévu. Les valorisations des actifs dits « risqués » sont à ce jour particulièrement élevées et pourraient souffrir d’une augmentation des primes de risques face à un scénario plus incertain impliquant une hausse de la volatilité des actifs financiers. En quelques mots, nous nous attendons à ce que les rendements prévus pour les principales catégories d’actifs soient relativement modestes au cours de l’année à venir.
La croissance des bénéfices s’accélère à nouveau et les taux d’intérêt à court terme diminuent, ce qui constitue un socle solide pour le marché des actions. Cependant, comme mentionné, celles-ci – en particulier aux États-Unis – sont chères et anticipent déjà une bonne partie de la reprise cyclique. Le niveau actuel élevé des multiples de valorisation du S&P500 n’a été atteint que deux fois auparavant : pendant la bulle Internet et peu de temps après la période de COVID. De plus, la concentration du secteur technologique y est importante. Dès lors, nous préconisons une exposition sélective aux actions américaines en dehors de l’indice principal S&P500 en utilisant par exemple un positionnement équipondéré, plus susceptible de bénéficier d’un élargissement de la croissance de l’économie réelle. C’est aussi un moyen d’être plus exposés au style « value » que nous pensons mieux tirer son épingle du jeu à l’avenir.
Autre poche de valeur que nous identifions, les petites capitalisations boursières. Elles offrent une croissance des bénéfices plus élevée que les grandes capitalisations et en Europe, contrairement aux Etats-Unis, elles se négocient à des multiples de valorisation inférieurs. Le pessimisme généralisé à l’égard de la région est, selon nous, largement intégré dans les cours et nous voyons donc des opportunités sur ce secteur.
Sur le marché obligataire, les rendements gouvernementaux à 10 ans se sont désormais normalisés autour de leur valeur d’équilibre de long terme. Comme la partie courte de la courbe est également plutôt bien évaluée en ce qui concerne l’assouplissement monétaire attendu, il est temps de bloquer des rendements plus longs aux alentours de 4,5 % (États-Unis) et 2,40 % (Europe), d’autant plus que les principales courbes de taux sont désormais désinversées sur le segment 7-10 ans. Une surpondération de la duration est dès lors bien rémunérée, et représente en outre une protection en cas de scénario de ralentissement économique inattendu (3e risque évoqué plus haut). Pour pallier au risque de recrudescence inflationniste, nous déployons une partie de notre duration sur le marché des obligations d’état américaines indexées à l’inflation, qui offrent un rendement réel attractif au-dessus de 2% à 10 ans.
Nous sommes par contre prudents sur le crédit, les spreads ayant atteint des niveaux particulièrement serrés qui présentent un risque asymétrique d’écartement par rapport au portage additionnel offert.
A garder en tête : lorsque les actions et les obligations évoluent en tandem (corrélation positive), typique d’un régime inflationniste, la diversification au sein d’un portefeuille 60/40 devient difficile, ce qui nécessite d’autres stratégies de diversification, dont l’or est un des principaux candidats, même si une augmentation du métal jaune doit s’envisager à un cours inférieur au niveau actuel.
Une autre source de diversification vient des investissements alternatifs pour lesquels nous avons un appétit grandissant. Ils devraient continuer en 2025 à apporter une source d’alpha appréciable au sein d’un portefeuille multi-actifs. Nous sommes positifs sur le secteur immobilier coté (REITs) et non coté qui traite encore à une décote importante par rapport à fin décembre 2021. Nous y favorisons l’exposition au secteurs résidentiel et industriel au détriment des secteurs commercial et de bureaux. Nous voyons des opportunités en particulier le secteur immobilier suisse dont les fondamentaux sont attractifs.
Les Hedge Funds, après une très bonne année 2024, devraient encore bien se comporter en 2025 grâce à l’augmentation de la volatilité des marchés financiers, à la forte dispersion des résultats d’entreprises et certaines divergences des politiques des banques centrales. Nous favorisons ainsi les stratégies de Long/Short Equity, d’Arbitrage et de Global Macro.
Le Private Equity, après un ralentissement suite à la crise de 2022, devrait capitaliser sur la thématique de l’intelligence artificielle. Egalement, le secteur de la dette privée, en pleine croissance, offre une alternative très attrayante (et une bonne diversification) au secteur traditionnel de l’obligataire liquide pour des investisseurs en recherche de rendement.
Finalement, l’évolution des matières première dépendra d’une multitude de facteurs et de paramètres économiques. Nous anticipons une baisse à moyen terme des prix du pétrole ainsi qu’une baisse des denrées alimentaires.
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