La succession d’une entreprise est un processus qui nécessite de l’anticipation, de la préparation et de la réflexion. Chaque cas de succession d’entreprise est différent, il convient dès lors de se poser les bonnes questions et d’utiliser les bons outils juridiques afin d’optimiser la transmission.
La présente contribution a pour but d’attirer l’attention des enterpreneurs et de leurs conseillers sur deux aspects juridiques qui apparaissent de manière récurente lors de la succession d’une entreprise.
Le choix du régime matrimonial
Le droit suisse connaît trois types de régimes matrimoniaux : le régime de la participation aux acquêts (articles 196 ss. du Code Civil), le régime de la séparation de biens (articles 247 ss. du Code Civil) et le régime de la communauté de biens (articles 221 ss. du Code Civil). Les époux sont soumis par défaut au régime de la participation aux acquêts, si aucun contrat de mariage n’a été conclu.
A titre d’exemple, dans le cas de la participation aux acquêts, si l’entreprise a été créée durant la prériode du mariage au moyen d’économies accumulées au cours de l’union conjugale, le conjoint de l’entrepreneur a droit à la moitié de la valeur de l’entreprise lors de la liquidation du régime matrimonial qui intervient généralement soit par un divorce soit par un décès. Vous l’aurez compris, un tel cas de figure peut mettre à mal la succession d’une entreprise.
Le droit suisse prévoit des dispositions qui permettent d’éviter un tel résultat. Les époux peuvent par exemple conclure un contrat de mariage et opter pour le régime de la séparation de biens. Les époux peuvent également choisir une solution moins drastique en maintenant le régime de la participation aux acquêts mais en décidant, par contrat de mariage, que l’entreprise restera entièrement la propriété du conjoint entrepreneur en cas de liquidation du régime matrimonial (article 199 al. 1 du Code civil).
Il est important de garder à l’esprit que rien n’est figé ou définitif, un contrat de mariage peut être conclu en tout temps et même avoir des effets rétroactifs pouvant aller jusqu’au jour du mariage.
La mise en place
de dispositions testamentaires
L’entrepreneur doit également être conscient qu’en cas de décès, s’il ne met pas en place des dispositions pour cause de mort, la répartition de sa succesion sera régie par les règles du Code civil, lesquelles prévoient en substance que le conjoint survivant et les descendants se partagent par moitié la masse successorale (article 462 ch. 1 du Code civil).
En cas de décès de l’entrepreneur et toujours dans le cadre de l’exemple que nous avons traité plus haut, il est possible (dans l’hypothèse où l’entreprise représente l’intégralité de la valeur de la masse successorale) que le conjoint se voit attribuer la moitié de l’entreprise à titre de liquidation du régime matrimonial puis la moitié de la moitié restante au titre du partage de la succession. Dans ce cas de figure, les descendants ne se voient attribuer qu’un quart de l’entreprise.
Ce système n’est absolument pas satisfaisant, d’autant plus s’il l’un des descendants souhaite reprendre l’entreprise.
Il existe néanmoins de solutions légales afin d’éviter un tel scénario. L’entrepreneur peut notamment rédiger un testament (articles 498 à 511 du Code civil) par lequel il limite la part successorale du conjoint et de certains de ses descendants. Il peut également conclure avec son conjoint et ses descendants des pactes successoraux (articles 512 à 516 du Code civil) dans lesquels les héritiers renoncent à certains biens en contrepartie d’une compensation. Le pacte successoral présente l’avantage certain d’être difficilement attaquable par l’héritier qui l’a accepté.
Le droit successoral met à disposition de nombreuses autres possibilités qui permettent de planifier sereinement la transmission de son entreprise.
En conclusion
La question du choix du régime matrimonial ainsi
que la mise en place de dispositions testamentaires sont des éléments importants à prendre en
considération lors de la planification de la succession d’une entreprise. Cela étant, de nombreux autres aspects juridiques tels que la restructuration
de l’entreprise ainsi que la planification fiscale doivent également être étudiées attentivement. Il convient donc d’être bien conseillé et de s’y prendre suffisamment à l’avance pour une succession réussie.