Redéfinir la politesse à l’époque moderne

21 avril 2025

Redéfinir la politesse à l’époque moderne

Par Thierry DIME

Chères lectrices, chers lecteurs,

Un jour, un ami m’a glissé cette remarque, mi-ironique, mi-sérieuse : « Si tu ouvres la porte à une femme, c’est une injure, et si en plus tu lui dis qu’elle est belle, c’est de la prison ferme ! » Il plaisantait, bien sûr, mais au-delà de l’humour, ces mots révèlent une réalité complexe : la difficulté de trouver un équilibre entre les gestes de politesse, les compliments innocents et l’évolution des sensibilités sociales. À l’heure où les rapports humains se redéfinissent, notamment entre hommes et femmes, il est parfois déroutant de savoir ce qui est perçu comme bienveillant ou intrusif, respectueux ou déplacé. Comment naviguer dans ce contexte sans perdre la spontanéité des interactions qui rendent notre société humaine et chaleureuse ?

La politesse : un art qui divise

Dans de nombreuses cultures, ouvrir une porte à quelqu’un, homme ou femme, est avant tout un geste de courtoisie. Il traduit un respect mutuel, une attention portée à l’autre. Pourtant, dans notre époque où les relations de pouvoir et les inégalités sont de plus en plus questionnées, ce geste peut être interprété différemment. Certaines personnes y voient un signe de galanterie désuète, une réminiscence d’un temps où les femmes étaient considérées comme fragiles et dépendantes. Pour d’autres, c’est tout simplement un acte d’éducation et de respect, qui devrait s’appliquer à tout être humain, indépendamment de son genre.

Alors, faut-il s’arrêter de tenir une porte de peur d’être mal compris ? Absolument pas. Mais cela nous invite à réfléchir à la manière dont ces gestes s’inscrivent dans des relations plus larges. Sont-ils un moyen de renforcer des stéréotypes ou, au contraire, de célébrer une attention sincère envers autrui ?

Quant au fait de dire à une femme qu’elle est belle, le terrain devient encore plus glissant. Pendant longtemps, ce type de compliment était perçu comme un moyen simple d’exprimer son appréciation. Mais dans un monde où les femmes ont dû se battre pour être reconnues au-delà de leur apparence physique, ce type de remarque peut être ressenti comme réducteur, voire oppressif. Tout dépend évidemment du contexte, de l’intention et de la relation entre les personnes concernées. Un compliment sincère et bien placé peut illuminer une journée. Mais s’il est mal formulé, s’il semble déplacé ou s’il survient dans un cadre inapproprié, il peut être interprété comme une intrusion ou un rappel des inégalités persistantes entre les genres. Alors, faut-il arrêter de faire des compliments ? Certainement pas. Mais il est utile de se demander : pourquoi faisons-nous ce compliment ? Est-il pertinent dans ce contexte ? Contribue-t-il à valoriser la personne ou à renforcer un stéréotype ?

Une évolution nécessaire

Les changements sociaux et culturels que nous vivons aujourd’hui, notamment autour des questions de genre, sont essentiels. Ils nous poussent à remettre en question des comportements et des réflexes qui, bien qu’ancrés dans nos habitudes, peuvent perpétuer des inégalités ou des malentendus. Cela ne signifie pas que nous devrions bannir la galanterie, la politesse ou les compliments. Mais ces pratiques doivent évoluer avec notre société. Il s’agit de privilégier l’intention, la sincérité et le respect, tout en restant attentif aux sensibilités de chacun. Plutôt que de céder à la peur de mal faire, cultivons l’art du dialogue. Si un geste ou un mot est mal perçu, utilisons cette occasion pour comprendre pourquoi et ajuster notre comportement. La bienveillance, au-delà des mots ou des actes, réside dans notre capacité à écouter et à apprendre.

Ouvrir une porte ou faire un compliment ne sont pas en soi des actes problématiques. Ce qui compte, c’est le regard que nous portons sur l’autre et l’intention qui guide cette action à ce moment précis. Si ces gestes sont empreints de respect, ils peuvent continuer à faire partie de nos interactions quotidiennes, sans crainte ni culpabilité. Alors, ouvrons des portes – au sens propre comme au figuré – et continuons à construire une société où l’attention et la considération pour l’autre restent des valeurs essentielles. Mais faisons-le avec une dose de réflexion, d’humilité et, bien sûr, d’humour. Parce qu’après tout, c’est aussi ce qui rend la vie plus belle.

* * * * * * * * * * *

PS : En tant que journaliste, mes éditos n’ont aucune intention de heurter les sensibilités, mais visent à engager une réflexion constructive et bienveillante sur les nuances des interactions humaines dans un monde en constante évolution.

Retrouvez l’ensemble de nos articles Décryptage

 

Recommandé pour vous