Photo © Indigita
Par Achille Deodato, CEO Indigita SA et Romain Potet, CEO of BRP Tax
La fiscalité est un aspect incontournable de notre paysage financier. Alors qu’il est universellement reconnu que l’impôt sur le revenu et le bénéfice ainsi que la TVA sont une nécessité pour financer l’ensemble des infrastructures et des services indispensables au bon fonctionnement de l’état tels que la formation, la santé, le social et la sécurité, les subtilités de la fiscalité des personnes physiques, en particulier dans le domaine des produits financiers, peuvent avoir un impact significatif sur le patrimoine des investisseurs. Naviguer sur le terrain complexe de l’imposition des revenus de la fortune mobilière nécessite une compréhension fine des implications associées aux choix d’investissement, surtout dans une économie de plus en plus internationalisée où les personnes domiciliées aux quatre coins du monde investissent dans des instruments financiers émis à l’étranger. De surcroît, les administrations excellent pour changer régulièrement les règles d’imposition selon les recettes fiscales attendues ou au rythme des diverses votations.
Au courant des dernières années, les investisseurs ont manifesté une sensibilité accrue aux considérations liées à la fiscalité, incitant les institutions financières à reconnaître l’impératif d’intégrer les implications fiscales dans leurs propositions d’investissement. Ne pas le faire expose non seulement les investisseurs à une imposition potentiellement punitive, mais également les institutions financières à une responsabilité, d’un point de vue du droit civil, pour avoir, dans le cadre d’un mandat, conseillé de manière inadéquate des stratégies d’investissement non dommageables sur le plan fiscal.
Imaginez par exemple le scénario où une banque recommande un produit financier qui est structuré de manière préjudiciable aux obligations fiscales d’un client. Un tel oubli peut engendrer des charges fiscales injustifiées pour l’investisseur et également soulever des questions concernant la responsabilité de bonne diligence de la part de l’établissement.
Il incombe désormais aux banques et aux gérants de fortune de discerner les investissements propices à l’adéquation fiscale, en particulier lorsqu’ils s’adressent à une clientèle internationale. Cela nécessite une compréhension exhaustive des réglementations fiscales nationales des différents pays, en particulier lorsque les portefeuilles d’investissement sont déposés à l’étranger. En effet, l’imposition des rendements et des plus-values réalisées diffère selon le domicile de l’investisseur. Il convient en outre de tenir compte des statuts fiscaux spéciaux de plus en plus nombreux, tels que les forfaits, qui impliquent une gestion rigoureuse des investissements, souvent par la prise en compte du principe de territorialité mais aussi des prélèvements à la source d’impôts étrangers sur les distributions.
Face à ces complexités, les institutions financières sont contraintes de s’appuyer sur un mélange d’expertise fiscale et d’outils numériques capables de traiter de vastes quantités de données. Tout en s’abstenant de fournir des conseils fiscaux explicites, elles doivent faire preuve de diligence pour éviter de recommander des produits toxiques sur le plan fiscal qui pourraient compromettre le bien-être financier de leurs clients. Une planification proactive dès les premières phases de structuration d’un portefeuille peut mitiger les risques commerciaux et civils en évitant une imposition dommageable tout en optimisant la performance après impôts des investissements.
Dans la pratique, l’établissement financier doit procéder à une analyse préalable pour tout produit financier qu’il envisage de proposer à sa clientèle. Cette analyse vise à déterminer si le type de produit et/ou sa structure sont adaptés d’un point de vue fiscal. Bien que l’établissement ne soit pas légalement tenu d’informer le client de cette démarche, il lui rendra service en garantissant une proposition d’investissement plus avisée.
Les contrôles et analyses de ce type sont habituellement effectués au sein des départements de planification patrimoniale et de gestion centralisée ou peuvent également être automatisés dans les systèmes bancaires. Cependant, doter les conseillers à la clientèle d’une plateforme permettant d’identifier immédiatement si un produit est fiscalement avantageux ou non peut également s’avérer un atout supplémentaire. Un conseiller ayant une clientèle privée internationale se doit, en effet, de connaître les éléments essentiels des systèmes fiscaux applicables à ses clients. Ces vérifications préalables évitent tout acte de gestion dont les conséquences fiscales seraient préjudiciables au point de mettre en cause le succès du placement d’un produit financier. Ce principe entre dans le cadre de ses obligations en tant que gérante de fortune sans pour autant relever d’un service de conseil en matière fiscale.
En conclusion, l’impératif des stratégies d’investissement intelligentes en matière de fiscalité ne peut être surestimé dans la poursuite du succès financier. Alors que les investisseurs luttent contre les complexités de leur imposition, les institutions financières jouent un rôle essentiel en les guidant vers des voies d’investissement adéquates. En intégrant les considérations fiscales dans les propositions d’investissement et en tirant parti des outils numériques pour naviguer dans le labyrinthe des réglementations, les institutions financières peuvent permettre aux investisseurs de naviguer vers leurs objectifs en toute confiance.
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