Toute décision a sa portée symbolique

8 septembre 2014

Toute décision a sa portée symbolique

Lors de tout processus de décision, l’attention du décideur est tournée quasi exclusivement vers l’objet à l’origine dudit processus. Focalisé sur le fond du problème, il mettra toutes ses forces à contribution pour prendre « la bonne décision ». En fonction du sujet, il devra intégrer des éléments qui pourront être autant financiers que juridiques, humains ou commerciaux, voire tous à la fois.

En d’autres termes, les efforts déployés par les cadres d’une entreprise lors de prises de décisions font appel à beaucoup d’énergie et, une fois arrivée au terme du processus, la personne concernée ressent un très légitime sentiment de mission accomplie, d’autant plus s’il s’agissait de régler un problème.

Néanmoins, il est tout aussi vital, en sus de la décision elle-même, de considérer les effets qu’elle aura lorsqu’elle sera connue du personnel de l’entreprise. Et là, les surprises peuvent être grandes, au point que tous les bénéfices de la décision elle-même peuvent être annihilés par l’effet produit.

Quelques exemples illustratifs :

  • Une entreprise occupée à trouver des pistes pour optimiser ses résultats financiers décide de passer au crible toutes ses dépenses et, dotée d’une crèche, envisage de se séparer de ce centre de coûts, en aucun cas stratégique. Sur le plan purement rationnel, cette décision s’impose d’elle-même, tant elle permet d’effectuer des économies substantielles sans toucher à l’outil de production. Par contre, sa portée symbolique est telle qu’elle peut avoir une influence très importante sur le personnel. Ce type de prestation touche à la relation affective entre les employés et leur entreprise. Il en va de la culture de cette dernière et, partant, de la motivation générale. Par conséquent, au-delà des arguments purement rationnels, il conviendra de bien peser les pour et les contre, l’effet négatif sur le moral des troupes pouvant avoir des conséquences sur la performance.
  • Un membre de l’équipe détruit, par son comportement, systématiquement l’ambiance de travail, provoquant de plus en plus de plaintes des collaborateurs qui s’en remettent à la hiérarchie pour mettre de l’ordre. Après de nombreux entretiens suivis d’autant d’avertissements totalement infructueux entre cette dernière et l’intéressé, il n’y a plus d’autre issue que le licenciement. De façon surprenante mais bel et bien assez fréquente, des voix se font entendre au sein du personnel, estimant que la mesure était un peu trop brutale. Le licenciement étant considéré, dans l’imaginaire collectif, quasiment comme une condamnation à mort, l’effet d’annonce prend en général les collaborateurs à froid.
  • Le responsable d’une équipe a l’occasion de recruter une personne aux talents sortant de la norme, dotée de capacités qui permettront d’atteindre des résultats d’ensemble dépassant les espoirs les plus fous. Loin de se réjouir de l’arrivée du nouveau, bon nombre de collaborateurs y verront un énorme risque pour eux d’être éclipsés, sans tenir compte du fait que la réussite de l’individu rejaillira sur la performance d’ensemble.

Toute décision à sa portée symboliqueCes quelques exemples pour illustrer que, derrière la bonne ou la mauvaise nouvelle, se cachent des réactions inattendues qui peuvent prendre le responsable de la décision par surprise. Il est donc vital, dans tout processus de décision, de considérer les effets futurs de cette dernière tout au long de la démarche, afin d’anticiper les conséquences et de pouvoir en atténuer les influences négatives.

Dans certains cas, et l’un des exemples vise à l’illustrer, la pesée des intérêts peut amener le décideur à adapter les plans initialement prévus. Cela ne veut pas dire pour autant que le management doit avoir peur de prendre des décisions, mais il est dans son intérêt et dans celui de l’entreprise de maîtriser autant que faire se peut la question de l’impact qu’elles auront sur le moral des collaborateurs. Quoi qu’il en soit, il est indispensable de préparer une communication bien adaptée.

A l’instar des hommes politiques qui « préparent » l’opinion publique, cette démarche peut impliquer de poser des jalons par une communication anticipant ce qui va venir, en préparant les collaborateurs. Et quand bien même une entreprise n’est pas une démocratie obéissant aux règles de la consultation, la maîtrise des effets « symboliques » des décisions représente un défi clé du management. Une décision bien communiquée aura un effet bénéfique sur la motivation des troupes, le contraire étant vrai également !

Bernard Stoessel, Consultant pour le magazine Le Monde EconomiqueBernard Stoessel, Consultant pour le magazine Le Monde Economique et Associé Fondateur de BS MANAGEMENT

 

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