UNE DETENTE BALNEAIRE… LOIN DES BALLES ET DES BOMBES

16 août 2016

UNE DETENTE BALNEAIRE… LOIN DES BALLES ET DES BOMBES

Depuis au moins deux ans, les centres balnéaires et touristiques sont devenus l’une des cibles préférées des terroristes qui, tout en profitant d’une certaine baisse de la vigilance (c’était au moins le cas jusqu’alors) en temps de vacances et de congé, cherchent lâchement à attaquer l’un des grands symboles de la civilisation occidentale moderne – la détente. Bien évidemment, on vise aussi à déstabiliser politiquement les pays d’accueil touristique. Parmi les plus touchés sont – faut-il les citer ? – sont la Turquie, la Tunisie et l’Egypte… Destinations longtemps préférées des estivants européens, dont les Suisses, ces trois pays sont aujourd’hui carrément rayés de la liste des préférences vacancières. Cet été, les Helvètes qui s’y rendent sont moins 50 à 70%.

Si la frustration est grande chez les étrangers devenus visiteurs « inconditionnels » des côtes de la mer Egée ou de la mer Rouge, la détresse de la population locale provoquée par l’effondrement de leur secteur touristique est totale. Grand employeur jusqu’alors en Turquie, en Tunisie et en Egypte, le tourisme dans ces pays voit maintenant des milliers de gens rester sans travail, parfois même sans moyens élémentaires de subsistance.

Certainement, avec les attaques terroristes en Europe perpétrées pendant les derniers mois, la géographie du tourisme s’est sensiblement modifiée. Cet été, on a pu observer une réorientation des flux des vacanciers qui, abandonnant les pays susmentionnés, se sont dirigés vers d’autres destinations. Les grands bénéficiaires sont l’Espagne et le Portugal mais la péninsule ibérique n’est pas la seule heureuse gagnante de cette redirection de l’exode estival. Dans leur liste de préférences, les Suisses, quant à eux, ont désormais inscrit le Nord scandinave, avec notamment la Norvège, et réaffirmé, avec de multiples départs pour la Thaïlande, l’Afrique du Sud et le Cuba, leur intérêt pour les séjours exotiques.

Une autre attitude, plutôt à l’envers de celle de s’envoler vers l’autre bout du monde, consiste à contourner tout simplement les pays classés dangereux et à aller « camper » dans des contrées voisines, moins connues par leurs attraits naturels mais en revanche plus sûres. En Afrique du Nord, région désormais assez trouble avec, notamment les attaques en Tunisie et en Egypte mais aussi la guerre civile en Lybie, il reste tout de même un pays qui se tient encore en dehors du climat de terreur et d’insécurité : le Maroc. Même si l’on ne se presse pas vraiment pour le relativement tranquille royaume maghrebin, c’est une destination souvent choisie par les Européens, au même titre que sont, dans le Golfe persique, les Emirats arabes unis avec Dubaï et Abu Dhabi.

En Europe, cette stratégie de contournement de villégiatures devenues aujourd’hui trop périlleuses, réoriente désormais les « inconditionnels » de la côte turque et d’Istanbul vers la Grèce et la Bulgarie voisines. Il faut souligner que de tous les trois pays musilmans cités plus haut comme étant l’objet (pour des raisons de sécurité) d’une considérable désaffection de la part des agences touristiques occidentales, la situation de la Turquie reste la plus délicate. En effet, le pays présente le double désavantage d’être à la fois la cible d’attaques terroristes et de potentiels coups d’Etat.

Destination traditionnelle toujours en rivalité avec la Turquie qui jusqu’alors se classait parmi les dix pays les plus visités du monde, la Grèce voit maintenant une partie de la clientèle « turque » affluer vers ses îles mythiques. Avec, bien évidemment, toutes les promesses d’une relative amélioration de sa situation économique – toujours très problématique – qu’un tel afflux touristique peut porter avec lui.

Avec la Bulgarie, l’autre gagnante de la débâcle du tourisme balnéaire en Turquie, on reste sur les Balkans et, dans un certain sens – au bord de la même mer (la Turquie ayant en effet pas moins de quatre frontières maritimes). Pour beaucoup de vacanciers occidentaux cet été, le « contournement » de ce pays classé désormais dangereux au profit de son voisin du nord a été l’occasion de découvrir la beauté et les délices du littoral bulgare de la mer Noire. La Bulgarie, de son côté, a élaboré, pour la saison touristique et balnéaire 2016, une campagne publicitaire astucieuse dont les vrais mots d’ordre ne sont plus « Sables d’or » ou « Côte du Soleil » (pour reprendre les noms de rêve de deux de ses plus belles villégiatures) mais « sécurité » et « prévisibilité ». «Nous sommes une destination sûre, prévisible et bon marché», avait à maintes reprises souligné la ministre bulgare du tourisme Nikolina Anguelkova. Cette publicité basée moins sur les charmes naturels que sur les garanties de sécurité s’avère bien payante dans cette 2016 où un séjour balnéaire a plus à voir avec la géopolitique qu’avec la couleur de la mer au couchant du soleil : la Bulgarie voit maintenant affluer vers elle non seulement une nombreuse clientèle russe jusqu’alors acquise à la beauté de la côte turque mais aussi beaucoup d’Occidentaux.

 

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